Sylvie Germain, Petites scènes capitales Albin Michel, 2013, 250 p. |
Me revoilà, jurée hypocondriaque et mal fichue comme on peut l'être au mois de janvier, avec le dernier Germain, et j'espère qu'Aspho et Margotte me pardonneront de ne pas être aussi enthousiastes qu'elles sur ce livre (bien que je l'apprécie quand même).
Grosso modo, Sylvie Germain nous déroule la vie
d'une certaine Lili/Barbara, qui, on peut le dire, n'est quand même pas la plus chanceuse du monde (donc a priori je l'aime déjà). En trois mots, sa mère l'abandonne quand elle est bébé, son père se remarie avec une femme qui a déjà des enfants, et Lili/Barbara se sent, disons, un peu seule dans cette nouvelle grande famille.
Elle écrit remarquablement Sylvie Germain, et j'ai trouvé de vrais moments de grâce dans ce livre, pour Coralie c'est la scène de la balançoire, pour moi cela a été celle des fenêtres éclairées « ces rectangles de lumières qui s’ouvrent sur l’obscurité »
(p.57). J'aurais vraiment aimé écrire cet extrait du livre, c’est très beau ce que Sylvie Germain décrit des destins possibles que
proposent au passant les fenêtres éclairées. J'en garde un souvenir ému (et finalement je dois avoir gardé mes yeux d'enfant puisque je continue d'imaginer ce qu'il se passe derrière une fenêtre éclairée).
Mais, j’ai été gênée par le fait
que ce soit une romancière du malheur, de la mort, de la tristesse et de la
solitude. Même si elle décrit tout cela avec beaucoup de talent, la lire en
plein mois de janvier, là où les jours sont les plus courts et le temps le plus
triste, c’est assez dévastateur (d'autant que je n'ai pas non plus une forme olympique en ce moment ...et par nature). En mois de 300 pages, elle arrive à nous parler d'un bébé abandonné par sa mère (qui s'est sans doute suicidée ensuite), d'une adolescente
qui meurt bêtement d’une chute, d'une jeune femme qui accouche d’un bébé malformé, d'une soeur orpheline de sa jumelle et qui ne fera jamais son deuil, d'une femme qui n’aura jamais
d’enfant, des gens qui meurent seuls….
Je dois reconnaître que sur la fin, sa réflexion sur le cœur, le corps et l’art est très juste, le ton
est magnifique et elle cite Yves Klein, mon plasticien préféré entre tous.
Mais je suis restée à distance quand
même, justement parce qu’il n’y a que des scènes capitales, toutes petites
soient-elles, et qu’il m'a manqué quelques scènes quotidiennes, les menus
plaisirs et les routines ordinaires...l’odeur du tabac dont meurt Viviane par
exemple (2014, j'arrête hein).
Cela reste néanmoins un beau
moment littéraire et pour l'instant l'un des deux romans que j'ai lus avec le plus de plaisir dans le prix Elle, comme Valérie-leader d'ailleurs...(j'ai définitivement le rôle de fayote auprès du leader de notre groupe, que ce soit dit)
PS: je dédie ce billet à une libraire chère à mon coeur qui se reconnaitra.
De Sylvie Germain j'ai lu "Hors champs" qui m'avait ennuyée, et je n'ai pas le souvenir d'avoir trouvé ça particulièrement bien écrit. Je n'ai jamais été tentée de renouveler l'expérience...
RépondreSupprimerVraiment Sandrine? Je trouve que son style est très beau quand même, et j'ai lu celui-la avec plus d'enthousiasme que la pleureuse des rues de Prague, je ne connais pas "Hors champs"...mais probablement cela dépend des sensibilités de chacun.
SupprimerJ'ai fait une autre tentative avec Magnus, mais finalement, je ne crois pas que cette auteure soit pour moi. Pourtant, c'est ma meilleure note pour le Prix (c'est à désespérer). Et moi, j'aime bien quand tu fayotes. ;)
RépondreSupprimerMoi aussi, c'est ma meilleure note avec Tout ce que je suis....bon je fayote parce que toi et moi, nous sommes un peu seules parmi les autres jurées, point de vue goût quand même....il faut bien se l'avouer!
SupprimerJe ne suis pas sûre d'avoir envie de lire un livre si triste.
RépondreSupprimerIl l'est indubitablement ALphonsine...après si je l'avais lu en été, je pense que cette tristesse m'aurait moins gênée...
SupprimerTu sais que j'ai hésité pour mon article! Ces fenêtres éclairées sont superbes oui, j'ai relu le passage trois fois! J'adore regarder chez les gens depuis la rue
RépondreSupprimerOUi , j'avais aussi aimé le passage de la balançoire, mais elle y revient sur ces fenêtres éclairées, surtout quand Barbara n'essaie plus de savoir ce qui se cache derrière....
Supprimerbon , Galéa , arrête tout de suite, ce n'est pas en Janvier que les jours sont les plus courts ! Depuis le 22 Décembre déjà , ils RALLONGENT . Pour le reste , ça n'a pas l'air gai du tout, votre histoire, c'est sûr... De Sylvie Germain , je n'ai lu que l'Enfant Méduse , qui était beau ET tragique...pffff il va falloir acheter un bon Gavalda pour faire contrepoison !?!
RépondreSupprimerMais tu vas le lire aussi chère Mior, il sera dans ton prochain colis.
SupprimerJ'ai beau savoir que les jours rallongent, ce mois de janvier me paraît infinissable quand même et sombre à n'en plus pouvoir.
Quant à Gavalda...j'ai un doute quand même
C'est vrai que tu fayotes rudement parce qu'il y en ad'autres qui ont pensé comme toi ;-) Un beau livre mais auquel il manque vraiment une fin pour moi.
RépondreSupprimertu me connais Enna...faut toujours que j'en rajoute!!
SupprimerKatherine Pancol sort bientôt le premier tome d'une nouvelle trilogie, un bon livre doudou pour remonter le moral durant cet hiver non??! Sinon, de ce que tu dis de ce livre, le style d'écriture est plus intéressant que l'histoire en elle-même donc? Je passe mon tour sur des sujets pareils! Bizz
RépondreSupprimerpour être totalement honnête, une très belle écriture ça fait vraiment du bien à la lectrice dépressive que je suis en ce moment. C'est drôle que tu parles de Pancol, parce que je n'ai aucune honte à avouer que je la lis très régulièrement (y'en a c'est chic-litt, d'autres Gavalda, Kinsella, moi c'est Pancol)
Supprimerchick-litt....arggg
SupprimerJe suis comme toi pour les fenêtres éclairées... :)
RépondreSupprimerDes poutres au plafond ou des moulures, des morceaux de meubles, de bibliothèque ou de décorations... des familles, des gens seuls, des joies, des peines, des vies... qui ne croiseront peut-être jamais la mienne alors qu'à ce moment là nous ne sommes qu'à quelques mètres.
Divagations romantico-philosophiques pour rêveuses empathiques (ou empathiques rêveuses)... ^^
Punaise, 20/20 pour ton comm ZAP, j'aurais aimé le dire aussi bien (je savais qu'on se comprendrait sur ce coup-là)
SupprimerJe n'ai lu qu'un Sylvie Germain il y a des lustres, un livre qui m'avait fait penser aux Hauts de Hurlevent (en beaucoup plus mauvais). Alors, celui-ci, avec ce que tu écris "d'une soeur orpheline de sa jumelle et qui ne fera jamais son deuil", non merci.
RépondreSupprimerJe dois dire Jackie que c'est peut-être un peu malhonnête de ma part de résumer comme cela...mais globalement, c'est un livre d'une immense tristesse sur ceux et celles qu'on a perdus....
SupprimerCe n'est jamais gai Sylvie Germain, mais je la lis régulièrement pour l'écriture, incomparable. Là, j'ai aimé toute la partie ou Lili est enfant, après j'ai nettement moins apprécié et je suis d'accord, la barque est chargée côté malheurs bien glauques ..
RépondreSupprimerJe suis comme toi Aifelle, j'ai préféré de loin la vie de Lili à celle de Barbara...
SupprimerComme dit Aifelle, la barque est chargée... Un malheur suffit, dans un roman de ce genre (sinon, on lit un bon gros mélo de la fin 19ème siècle, rha lala!)(quoique, je connais en vrai une famille où 2013 a apporté son lot de cochonneries...)
RépondreSupprimerOn doit reconnaître à Germain une écriture très moderne le trouve, et pas du tout fin 19è siècle, je trouve! Je sais qu'il y a des familles qui conjuguent les malheurs au pluriel, mais là, ça fait vraiment beaucoup!!
SupprimerC'est vrai qu'il n'a pas l'air très gai.
RépondreSupprimerIl ne l'est pas, c'est clair!
Supprimertrès beau style, mais je me suis quand même ennuyée...la description de la vie familiale et des relations dans une famille recomposée m'a beaucoup plu, mais quand Lili devient adulte, j'ai trouvé que ça manquait de profondeur.
RépondreSupprimerOui je crois que c'est un constat général, Barbara est moins bien aboutie que Lili....
SupprimerJ'aime bien cette auteure et celui-ci finira par atterrir dans mes mains ...
RépondreSupprimeroui, je pense Malika, parce que ça reste un beau moment littéraire....
SupprimerJe ne l'ai pas encore lu mais cela ne saurait tarder, j'aime beaucoup son écriture mais comme certaines, je ne trouve pas mon compte d'espoir dans ses livres...
RépondreSupprimerBelle journée à toi !
Ah ah Enitram, je ne pense pas qu'il faille chercher son compte d'espoir cher Germain, par contre, des belles phrases, ça fait quand même drôlement du bien....
SupprimerJamais lu Sylvie Germain mais d'après ce que tu en dis ça pourrait me plaire^^
RépondreSupprimerIl y a des chances oui Jérôme!!!
SupprimerBien sûr que je te pardonne si tant est qu'il faille pardonner si une autre personne n'aime pas autant un livre que nous l'avons aimé !!! J'ai sursauté car moi aussi la scène des fenêtres éclairées est une de mes préférées ! Je t'avouerai que ce n'est pas mon livre préféré de Sylvie Germain même si son style est bien au-dessus de la mêlée en général (on ne peut pas lui enlever ça, que l'on aime ou pas) ! Je préfère Sylvie germain quand elle mêle un peu de fantastique comme dans Tobie des marais ou Le livre des nuits (lu fin décembre et un coup de coeur énorme, pas encore chroniqué, bouh). Dans ces livres là, le style est mis en valeur et je le trouve somptueux même si c'est triste, souvent... Bon, d'accord, janvier n'était pas la période idéale mais pour qui janvier est-il le mois idéal ? S'il y en a, levez le doigt ! :) Quant à la fin de Petites scènes capitales, à vrai dire il n'y a pas vraiment de fin, je pense que c'est la vie qui continue, il n'y a de fin qu'avec notre propre disparition mais je suis restée en porte-à-faux moi aussi...
RépondreSupprimerA cause...non grâce à toi et Margotte, je vais persister sur Germain avec Tobie des marais je pense, effectivement son style est vraiment supérieur à la plupart des auteurs que je lis en ce moment...
SupprimerPlus que quelques jours à enterrer janvier....je suis contente qu'on soit aussi nombreuses à se sentir interpellées par les fenêtres éclairées...
à lire ou relire : "LES FENETRES", petit poème en prose de CH. BAUDELAIRE... un bijou ! PASC
RépondreSupprimerNoté Pasc...par contre tu n'as pas mis ton blog en lien...c'est dommage
SupprimerJe suis aussi assez mitigée. Comme toi, j'étais restée un peu à distance de l'histoire et surtout j'avais trouvé ça terriblement triste.
RépondreSupprimerNous sommes donc d'accord Mrs Figg ;-)
SupprimerOui, c'est vrai que l'histoire n'est guère joyeuse, mais punaise, quelle écriture ! :D
RépondreSupprimerC'est vrai Leiloona....
SupprimerJe n'ai (encore) lu celui-ci mais Sylvie Germain fait partie des plumes françaises que j'admire le plus !
RépondreSupprimerJe suis d'accord Sylire, elle a une très belle écriture, mais ça ne suffit pas toujours à faire un coup de coeur....
SupprimerJe viens de terminer Rien ne s'oppose à la nuit : ça y est, j'ai eu mon lot de malheurs/suicides/inceste/anorexie pour l'année! Je passe à des choses plus légères et pour Sylvie Germain, je reste sur les très bons souvenirs que j'ai de ses premiers romans!
RépondreSupprimeroui alors Gwen c'est sûr que s'enchaîner ces 2 là en plein mois de janvier, à part si tu es gavée de Prozac c'est hyper risqué....
SupprimerJe passe ici en catimini et de manière anonyme car oserais-je dire que je n'ai pas encore lu Sylvie Germain? Je pense que à chaque fois qu'elle sort un bon livre, je suis absente ou malade ou sourde! Comme les fans ne disent pas que celui-ci est le meilleur je pars donc à la recherche du Fleuron de Madame Germain...
RépondreSupprimerAlors là Inconnue je ne suis pas certaine que ce soit son meilleur...il y a des auteurs comme ça, à côté desquels on passe. Je n'arrive pas à aller sur votre profil ou blog chère inconnue mystérieuse...
Supprimerpas trop aimé...pas pour les mêmes raisons que toi mais je crois l'avoir trouvé un peu trop "chichiteux", trop je-ne-sais quoi...même si je reconnais les immenses qualités d'écriture de la dame ! tu as vu juste, ça manquait sans doute de légèreté !
RépondreSupprimerVirginie
http://mesmiscellanees.blogspot.fr
oui je crois qu'on est d'accord Virginie....
SupprimerUne éternité que je n'avais pas lu Sylvie Germain... J'ai adoré cette petite musique, pas très gaie certes, mais tellement belle...!
RépondreSupprimerEntièrement d'accord Noukette, pas besoin de gaieté quand c'est beau...c'est de loin ma meilleure lecture de ses dernières semaines (malgré mes petits bémols)
SupprimerTu sais certaines familles cumulent les tristesses et certaines vies sont encore plus incroyables que les romans... Il est dans ma PAL depuis la lecture du billet de Margotte, les extraits qu'elles donnaient m'ont littéralement happées, quel écriture !! Bises, bon week end (et on ne peut pas toujours être d'accord, c'est ça qui est intéressant ;0)
RépondreSupprimerL'écriture est indéniablement splendide, je lui reproche juste de se complaire dans un certain malheur, comme si l'esthétisme littéraire ne pouvait être que triste...(pas certaine d'être claire là...) mais bon tu vois l'idée générale hein LOr?
SupprimerDes bises ma belle (pas besoin d'être d'accord pour se suivre)
Pour ma part, j'ai bien aimé, mais carrément moins que les romans de l'auteur, qui touchent au sublime pour certains... Mais il faut savoir que Sylvie Germain ne fait jamais dans le gai et qu'au contraire, c'est toujours terriblement plombant... Mais l'écriture est si belle...
RépondreSupprimerEntièrement d'accord avec toi Liliba
SupprimerJe suis déroutée, j'voudrais bien, mais j'ose point... et tu me plombes mon coup !
RépondreSupprimerIl faut oser Zazy, une belle écriture fait toujours du bien
SupprimerHaaa, alors Sylvie Germain serait la soeur de Philippe Claudel, romancier de la mort, du noir, du désespoir et du malheur...elle pourrait me plaire , Aspho veut à tout prix que je la lise mais j'ai peur de pas tout suivre...
RépondreSupprimerOui, ce n'est pas bête cette comparaison avec Caudel...je trouve qu'il y a de ça oui...et Aspho est un fan de Germain, et je peux la comprendre!
SupprimerTiens un avis moins positif que les autres... Le lirai-je ? Peut-être... mais le seul livre que j'ai lu d'elle ne m'a guère plu alors j'hésite... surtout après ta critique...
RépondreSupprimerJe crois Krol, que son oeuvre est assez inégale; mais je n'ai pas l'impression d'avoir fait une critique à charge ! Si?
SupprimerJe crois que malgré cette tristesse, je la lirai. J'aime trop sa plume.
RépondreSupprimerSa plume est très belle c'est vrai...
SupprimerC'est bien tardivement que je viens enfin déposer un com sur ce billet que j'avais pourtant lu dès sa "sortie"... Plus qu'une romancière du "malheur", Sylvie Germain est une romancière de la "résilience". Elle met toujours en scène des personnages qui vivent des événements difficiles mais qui, d'une manière ou d'une autre, vont trouver la voie d'une sorte d'apaisement. Ce n'est pourtant jamais mièvre. On passe de la violence baroque à un calme réparateur, de la fulgurance au silence. Tout cela, en plus, est tissé autour d'une vraie philosophie. Enfin, je m'égare... je suis totalement fan, tu le sais... et quelle écriture (je la relis régulièrement, je suis d'ailleurs plongée en ce moment même dans "Songes du temps").
RépondreSupprimerBonne journée à toi !