vendredi 29 mai 2015

En finir avec Eddy Bellegueule (audio)

 En 2014, entre Val et moi, il y aura eu (entre autres choses et gens) Edouard Louis. Son livre, son intervention à La Grande Librairie, le symbole qu'il pouvait représenter, la polémique de ses origines, le traitement de son homosexualité, son parcours universitaire et la Picardie...donc une fois n'est pas coutume, c'est chez moi qu'elle vient parler littérature avec la version audio; parce que si Val devait en finir avec Eddy Bellegueule (d'une manière ou d'une autre), c'était logiquement chez moi qu'elle devait clore cette affaire.

(PS: pardon pour la police fluctuante de ce billet...)

La parole à Val 

En février 2014, je lisais ce roman en version papier et j'ai mis des mois à décolérer. Ce billet va être un mélange de ce que j'avais écrit à l'époque et de ce que j’ai ressenti à l’écoute.

 Je n'avais pas été mise aussi mal à l'aise par un livre depuis Rien ne s'oppose à la nuit. Il y a dans ces livres qui dénoncent d'autres personnes ou un mode de vie, quelque chose d'insupportable pour moi, lié à l'impossibilité pour les autres de répondre aux attaques. Je sais que ceux qui ont aimé ce livre que je ne peux qualifier de roman puisque tout y est vrai, vont rétorquer qu'il ne dénonce rien, qu'il se contente de décrire. Je crois que ce ton qui se veut objectif m'a encore plus agacée. Dans sa description du milieu populaire dont il vient, personne n’est épargné : ses parents, sa grand-mère chez qui ça sent le chien sale mais encore pire, les ados qui soit le battent tout en s'attachant à lui ou le sodomisent dans la scène la plus glauque qui m'ait été donné de lire depuis très longtemps. 

Il y a une valeur qui est importante pour moi, c’est le respect. Edouard Louis ne respecte rien. Il n'y a aucun élément positif dans ce milieu. Dans le milieu d'où il vient, personne ne se comporte comme vous (enfin je le suppose) et moi et c'est finalement ce qui m'a le plus dérangée. J'ai eu l'impression qu'il nous englobait dans son monde, celui qui l'a sauvé de là d'où il vient et qu'il pointait du doigt l'autre, celui qui est si éloigné de notre quotidien, en nous disant : vous m'avez sauvé, vous qui connaissez le pouvoir des mots, vous qui aimez lire, d'un monde dont vous n'avez aucune idée et dont je vais vous ouvrir la porte. ! Il se trouve que mes origines picardes me mettent entre deux chaises, je suis à la fois du même monde qu'Eddy Bellegueule sans avoir oublié mes racines et les gens simples qui sont mes aïeux.                             

Je n'ai pas toujours été d'accord avec ses analyses. Par exemple, il explique le fait que son père et d'autres hommes refusent d'aller chez le médecin par un désir de paraître viril. Pour avoir côtoyé de près ce refus, je pense plutôt qu'il est dû, entre autre, à un manque de confiance envers les médecins et à une lutte des classes : le médecin, très à l'aise financièrement sans faire grand chose (je traduis d'autres pensées que la mienne, j'ai beaucoup d'admiration pour mon médecin) représente l'ennemi. Et si bien sûr, je ne peux expliquer les coups, je comprends tout de même que de trouver son enfant dans la situation dans laquelle sa mère le trouve alors qu'il n'a que dix ans peut faire perdre les pédales à de nombreux parents. D'ailleurs, cette scène m'a été insupportable. Je lui accorde le sens de la formule: 

Dans la chambre flottait encore l'odeur du cri de mon père.                  

Et j'ai aimé l'idée que ce qui le fait venir à la culture est sa différence et son besoin de se trouver une autre famille que la sienne, dans laquelle il ne se reconnaît pas. Dans cette autobiographie, certains passages ne m'ont pas paru crédibles.

J’ai depuis rencontré et écouté Edouard Louis, je comprends que l'auteur, dans son extrême jeunesse, ait eu besoin de faire ressortir son mal-être. Ca ne me rend pas plus à l'aise avec le roman. Ce qui est incroyable, c’est qu’en commençant cette écoute, je pensais que je pourrais enfin l’appréhender sereinement. Et il a suffi d’une conversation  à la piscine avec une amie que ce roman a autant agacée que moi et d’un mail d’une copine qui n’était pas d’accord avec mon avis publié sur Babelio (mais qui me le faisait savoir gentiment) pour que je comprenne que ce roman restera gravé en moi comme une blessure et que la colère reste là, enfouie. Ce roman n’est pas pour moi un plaidoyer contre l’homophobie mais un brûlot haineux contre une certaine simplicité.

Je n'ai pas été emballée par la lecture (un peu rapide à mon avis) faite par Philippe Calvario. Ce billet ne pouvait qu’être chez mon amie Galéa parce que nous avons tant parlé de ce roman, qu’elle a été très à l’écoute de ces moments où je devais faire sortir mon trop plein de colère.

Date de parution : 14 Mai 2014 Durée : 4h42


samedi 23 mai 2015

Brèves de galets: traité de vieillitude

C'est bientôt la cérémonie de clôture du Festival de Cannes, sommet du glamour et du glitter, ça brille et ça swing,  les vieilles actrices paraissent plus jeunes que leurs filles, le journaliste parisien vient goûter la cocaïne azuréenne, il me semble que c'est LE moment idéal pour parler de "la Vieillitude".

La Vieillitude, on l'a ou on l'a pas, et moi, Galéa, je me fais un devoir d'y consacrer un billet (toujours en pointe de l'actu et du fashion, tel est le créneau de ce blog d'investigation).

La Vieillitude commence le jour où on se souvient précisément de sa mère quand elle avait notre âge (généralement, on a une dizaine d'années et une mère permanentée comme un mouton sur le dessus de la tête, avec l'incontournable veste bariolée aux épaulettes disproportionnées). Ceux, comme moi, qui n'ont pas eu la chance d'avoir une mère moche, ont entendu toute leur enfance que c'était "une belle femme" sans comprendre vraiment comment pouvait-on être vieille et belle (heureusement pour mes filles, j'ai hérité des gênes paternels, et heureusement pour moi:  j'ai rencontré l'Homme très jeune, au faîte de ma bellitude, il est depuis obligé de faire avec).


La Vieillitude c'est croire au complot de l'industrie agro-alimentaire (avec une surveillance accrue de la composition des aliments et la traque des E en tous genres- bref la base). La Vieillitude c'est se méfier  du soleil qui n'est pas si sympa que ça (la crainte du mélanome quand on oublie la crème solaire), c'est ne se faire plus aucune illusion sur les politiques, les pharmaciens, les beaux-parents, les lotions anti-poux...C'est aussi être pour l'allemand, le latin, le grec, l'histoire enseignée dans un contexte chronologique, et croire en l'importance des cours de Français pour construire les citoyens de demain (aucun rapport avec l'actualité évidemment, je ne suis que mode, lifestyle et tendance). 

La Vieillitude, c'est avoir des manies, des routines et , disons le, être devenu psychorigide (en fait, le psychorigide l'est depuis toujours, mais ne le découvre qu'au moment où il rentre en vieillitude). Ne jamais terminer une journée sans une bière fraiche (sachant qu'un verre de vin est conseillé par les médecins, je dirais qu'on est dans l'idée générale de la prescription médicale), ne jamais se coucher sans sa tisane Nuit Calme (c'est fou comme on croit aux plantes quand on vieillit), mais garder un vague côté sale gosse en continuant de fumer, alors qu'on nous dit "bonjour Monsieur" au téléphone (c'est la Jeanne Moreau's attitude).

La Vieillitude c'est avoir (enfin) renoncer au "paraître" pour se concentrer sur notre "être" profond :  on assume ses bas de contention et ses vergetures (qui ne partiront JAMAIS sans la crème hors de prix que la vendeuse de Sephora tente de refiler à toutes les femmes entre deux âges). On renonce aux maillots de bain fluo, léopard, échancrés ou minimalistes. On marche dans des chaussures confortables à défaut d'être sexy, on se coupe la frange et on s'épile toute seule, parce que vraiment, notre image de femme fatale, on n'y tient plus tant que ça finalement (et pour cause, c'est la Bardot's attitude).

La Vieillitude c'est croire qu'on avait touché le fond avec Loft Story en 2000, et ignorer qu'il existe maintenant Les Chtis à Las Vegas. 

La Vieillitude c'est aussi se féliciter d'avoir été jeune avant l'apparition de Facebook et IG, et qu'il ne reste plus trop de traces de nos adolescences ingrates et notre jeunesse un peu honteuse.

La viellitude c'est comprendre que nos parents avaient parfois raison, qu'ils ont fait ce qu'ils ont pu et qu'on est pas sûr de faire mieux.

La vieillitude c'est être fidèle à ses principes et à son personnage en continuant inlassablement de reprendre les amis ou parents qui disent "la voiture à Jean-Claude". Ne surtout pas lâcher le rôle d'anti bout-en-train du dimanche et des soirées en ville, un rôle qu'on a mis des années à construire et peaufiner.

La vieillitude, c'est se croire encore crédible, quand on jure "sur ses yeux" que  JAMAIS nos filles n'auront de portable, de cigarettes, de poster de boys-band dans leur chambre, de sortie en boîte avant 21 ans  et qu'elles porteront, toute leur vie, des culottes Petit Bateau.

Et puis, la vieillitude c'est apprécier les trucs de vieux : l'aube, le silence, la plage déserte et le bruissement du matin. Comme les enfants, les vieux aiment les aurores (pourquoi perdre du temps à dormir alors qu'on peut être épuisée toute une journée?).  La viellitude c'est échapper -de peu- à une dépression quand on apprend la durée de vie d'une passiflore (ce qui reste une honte quand même); c'est ne plus tourner sa langue dans sa bouche avant de dire ce qu'on pense. La vieillitude, c'est se moquer du regard des autres et de savoir si on a raison ou tort, c'est s'arrêter à des détails qui paraissent primordiaux et se disputer copieusement avec les gens qu'on aime.

Mais dîtes donc, je me demande si la vieillitude, ce ne serait pas comme avoir retrouvé la sale gamine l'enfant qu'on a été.

vendredi 15 mai 2015

Le flou et la vie: photo du mois # 5

Dans la vie tout est une question de point de vue, de mise au point 
(et de rayures diverses et variées). 


Je remercie donc  Lyonelk, chargé de choisir le thème de la Photo du Mois de mai, qui a décidé d'imposer " le flou et la vie" (en citant Baudrillard s'il vous plait, ça ne rigole pas à La Photo du Mois, c'est du sérieux cette histoire). Je me suis donc dit que c'était la bonne occasion pour moi de distiller des phrases philosophiques qui compense le manque absolue de régularité de ce blog.

Le concept du "flou", pour quelqu'un comme moi, c'est assez facile. D'abord car je ne maîtrise pas toutes les fonctions de mon appareil photo (donc je suis une pro du flou-pas-voulu-mais-qui-est-là-quand-même),  mais aussi parce que c'est une notion qui me parle (moins carré et nette que moi tu meurs), et je trouve bien pratique le flou quand je veux mettre Numérobis sans qu'elle soit identifiable. 

Pour le côté "vie" de la consigne, c'est moins simple. Parce que tout de suite, on pense à quelque chose de joyeux et plein d'espoir, et là dessus je pêche quand même. Donc j'ai pris le parti du mouvement : des lampes renversées après des ballets improvisés dans mon salon, de tringles arrachées suite à des acrobaties en duo avec le rideau, de coin de tables qui meurtrissent les genoux juste avant l'été...

Donc je vous offre Numérobis en plein répétition du gala de fin d'année. 
C'est cadeau (d'autant que je vous ai épargné le son).


Allons voir comment mes camarades ont compris la consigne:

Josette, CécileP, Ava, Galéa, Milla la galerie, Testinaute, Brindille, Akaieric, Tambour Major, François le Niçois, Philisine Cave, Amy, Tuxana, Dom-Aufildesvues, Pixeline, Giselle 43, princesse Emalia, Yvette la Chouette, Agathe, Eva INside-EXpat, Cara, Dr. CaSo, La Fille de l'Air, Josiane, DelphineF, Voyager en photo, Renepaulhenry, Mimireliton, Nanouk, A'icha, Luckasetmoi, Christophe, Salon de Thé, Noz & 'Lo, Lyonelk, MyLittleRoad, Estelle, Autour de Cia, Iris, Pilisi, Aude, Champagne, Arwen, Thalie, Isaquarel, magda627, Journal d'une Niçoise, Rosa, Lavandine83, Gilsoub, Lau* des montagnes, Alexinparis, Laulinea, Lavandine, Guillaume, J'habite à Waterford, Céline in Paris, Sandrine, MissCarole, Loulou, Fanfan Raccoon, Xoliv', Frédéric, Les bonheurs d'Anne & Alex, Chat bleu, Sinuaisons, Blue Edel, Les Filles du Web, Calamonique, Canaghanette, Claire's Blog, Julia, Lecturissime, Laurent Nicolas, Nicky, Blogoth67, Mamysoren, Homeos-tasie, BiGBuGS, My Little Reflex, Rythme Indigo, El Padawan, KK-huète En Bretannie, Utopique-Lily, Dame Skarlette, Koalisa, Morgane Byloos Photography, Krn, Alban.

vendredi 8 mai 2015

Les Producteurs

Antoine Bello, Les Producteurs
Gallimard, 2015, 523 p.
Des semaines après l'avoir terminé, il fallait quand même bien que je boucle cette affaire des Falsificateurs sur mon blog, au prix de discussions tardives avec mes comparses bellosiens pour savoir comment interpréter la fin, de débats avec l'Homme qui préfère le tome 2 au tome 1, le temps aussi de se dire qu'on peut adorer un écrivain et être davantage sceptique sur l'homme, histoire de tiquer un peu sur l'opération marketing réalisé auprès des blogueurs...bref il me fallait une digestion un peu longue pour écrire ce billet foutraque. C'est toujours comme ça quand on élit un nouvel auteur à son palmarès personnel. 

Alors dans ce 3ème tome, Les Producteurs , on retrouve notre Sliv qui s'approche dangereusement de la quarantaine (sans que rien dans son existence ne l'atteste hormis qu'il a davantage de responsabilités au CFR), il est toujours question d'actualité, de politique américaine, de crise économique, de catastrophe écologiques et bien sûr de falsifications et manipulations en tous genres... on plonge donc dans la période 2008-2009, qui reste de mon point de vue, celle de la fin d'une époque.

On conserve la même structure que pour les Eclaireurs, c'est à dire qu'il y a un événement réel sur lequel le CFR travaille (l'élection de Barack Obama à la Maison Blanche, et ce qu' en fait Bello est incontestablement brillant) et un événement fictif : l'invention d'une civilisation maya oubliée, les Chupacs.

Les Chupacs, c'est ma partie, et ce qui me fait rêver : une civilisation pacifique qui ressurgit d'entre les eaux, avec épave, codex et vieux objets à dater,  une sorte de monde englouti humaniste, dépourvu des vices de pouvoir et de violence inhérents à l'homme, une communauté presque impossible. Pour cette merveilleuse trouvaille bien sûr, je suis reconnaissante à Bello (heureusement ceci dit qu'il a géré l'histoire de l'épave au final, car ça restait un obstacle de taille à la crédibilité générale, mais il est talentueux). Les Chupacs, c'est prendre le parti de se dire que si l'Humanité avait connaissance qu'une telle communauté soit possible, elle en deviendrait meilleure.

Mais là où ça coince, (attention spoiler) c'est sur le fait qu'un traitre devienne en 6 ans quelqu'un qui aspire à la concorde universelle. Les traitres le restent en général toute leur vie, on ne devient pas quelqu'un de bon à 40 ans (à ma connaissance). On m'a récemment traité de cynique, mais je ne crois pas à ce retournement. Quand on aime un auteur, on est exigeant, et on relève les détails qui grattent...néanmoins  je passe allègrement là dessus, parce que j'ai retrouvé chez Bello (et c'est pour cela que je lui pardonne tout le reste) mes échos personnels.

Je le suis ainsi reconnaissante de son absence totale de manichéisme, ainsi que de la manière dont il contourne l'histoire,  comment il nous montre avec l'épisode Sarah Palin, que dans la vie tout n'est qu'une question de point de vue, d'enrobage, et de communication, que la vérité absolue n'existe pas. Alors que je pense sincèrement que l'on meurt des certitudes des uns et des autres, Bello restera pour moi, l'écrivain de la vérité relative, de celle qui n'existe pas. Pas plus que les souvenirs fiables (les scènes de souvenirs sur la mort du père de Sliv forment un bijou), les choses changent à mesure qu'on tourne autour et qu'on modifie notre angle d'observation.

Et c'est par l'arrivée d'un nouveau personnage totalement caricatural (qui incarne tout ce qu'une blogueuse-donneuse-de-leçons déteste), qu'il fait passer le message. Avec Vargas (qui est le personnage du livre et non pas une romancière française qui a fait les beaux jours de LGL), on découvre une sorte de caricature cynique (vraiment), omnibulé par le profit, l'intérêt, et l'absence totale d'éthique, mais, qui balance des sentences que je trouve d'une immense justesse. Car Bello, au delà de l'intrigue, livre, de mon point de vue, une véritable réflexion sur l'histoire, le monde, la transmission des événements, et les impostures (même sur les impostures qui dépassent l'individu réel). Qui lit la trilogie attentivement, y découvre des réflexions profondes qui devraient tous nous donner à réfléchir. Et Vargas en est un vecteur remarquable. 

-"Les historiens, comme leur nom l'indique, racontent des histoires. Comprenez s'il vous plait la différence entre le passé et l'Histoire. Le passé, c'est ce qui est réellement survenu [...]. La vérité n'existe pas Sliv. Elle est constamment recréée. Vous connaissez l'adage "l'Histoire est écrite par les vainqueurs"..." p. 102-103

Il faut 12 h d'historiographie à l'Université pour que les futurs professeurs aient conscience de cela, on devrait leur prescrire ce genre de lectures.

Très grosse réussite aussi du côté de Nina (mon coup de coeur du tome 2), celle qui n'arrêtera jamais la lutte, mais qui, ayant passé la trentaine devient, comme nous tous, plus pragmatiques. Nous apprenons donc que maintenant elle s'épile les sourcils (croyez-moi, c'est un cap) parce qu'elle a pris du galon, en se retrouvant à la tête d'une association nationale. Elle est donc bien devenue patronne. Et quiconque a fréquenté de grands idéalistes qui n'existent que pour la lutte, reconnaîtra cette phrase de Sliv: "Je me demandais parfois si les écologistes ne se réjouissaient pas des catastrophes qu'ils prétendaient combattre" (p. 440). Et cela ne s'applique pas qu'aux écologistes....

Chez Bello, tout est juste, et particulièrement sa peinture des réseaux sociaux émergeant en 2008 et de leur travers, et c'est Mathilde évidemment qui en fait les frais (mon coup de coeur du tome 1). Mathilde sa soeur bien mariée, bien logée, bien fertile, qui, prise dans la crise économique, continue de faire croire que tout va bien sur Facebook. Et ce passage m'a rappelé tous ces amis qu'on a, et qui mentent en renvoyant une fausse image de leur vie "Ma soeur préférait à l'évidence l'histoire de la ménagère comblée, à celle de la banlieusarde surendettée. Il était difficile de lui en vouloir" (p.156). Même si on saluera au passage une certaine condescendance pour le commun des mortel, on ne peut qu'acquiescer au portrait que Bello fait d'eux (donc de nous). 

Mais de tous les personnages de ce tome 3 se dégage quelque chose qui ressemble à une certaine mélancolie, un constat de solitude. Sliv, Lena, ou Nina arrivent à l'âge où,  d'une certaine manière, ils sont quand même passés à côté de quelque chose, et si Maga et Youssef sont heureux en ménage (avec des jumelles tant qu'à faire), ils sont cette fois en arrière-plan du roman comme si Bello faisait une mise au point sur ses personnages brillants et seuls, comme s'il ne voulait pas en faire des gens "normaux". 

Je ne peux finir ce billet  sans évoquer la question qui a agité ma clique : Bello est-il un ultra-libéral ? Je me contenterai de répondre par cette phrase p.206, ou au sujet de la crise, il écrit: "Partout l'argent du contribuable servait à éponger les pertes abyssales causées par quelques patrons qui, non contents d'avoir gagné des fortunes à leur poste, réclamaient des indemnités pharaoniques pour abandonner leur fauteuil". J'en profite d'ailleurs pour dire qu'être un riche homme d'affaire américain n'empêche pas d'être un bon romancier.

En revanche, il y a la question de la postface, et toutes les interrogations qu'elles soulèvent, qui font de Sliv un personnage fantasmé. Et je me dis qu'entre Bello et moi, il y aura toujours Anna-Line Thorman. Cette femme, qui est à la fois Nina l'idéaliste et Léna l'ambitieuse, dont l'une perd sa fraicheur quand l'autre gagne en humanité, m'aura laissé cette impression tiède de ne pas savoir ce que je pense vraiment d'elle (et ça  me perturbe). Et pourtant, son idée exposé à l'avant-dernier paragraphe du roman reste pour moi de l'ordre du génie, et j'espère du fond du coeur, qu'un jour elle se réalisera dans la vie réelle.

vendredi 1 mai 2015

Les blogueurs parlent aux blogueurs # 1 - Jérôme d'une berge à l'autre

Il y a eu l'épidémie des blogs qui ferment, puis ceux qui se sont mis à tourner au ralenti; il y a les blogueurs qui ont tiré le rideau et ceux qui sont passés à autre chose, aux réseaux sociaux, plus instantanés, plus simples plus rapides. Alors, à quoi ça sert le blog? Est ce que ce n'est pas vain le temps qu'on y consacre, tout le travail en amont d'un billet...

Sauf que le blog reste comme un témoin de nos lectures, comme l'instantané d'un moment donné, d'une émotion et finalement je garde d'avantage le souvenir d'une chronique d'un livre que d'une dispute sur Facebook. 

Il y a aussi le fait que je sois une fille pénible, de celles qui critiquent tout et tout le temps, qui donne des leçons tous azimuts (alors que soyons honnêtes, je suis très mal placée pour ça). Et, à un moment, monologuer sur mon blog en marmonnant tout ce qu'il ne me convient plus, c'est un peu tourner en rond aussi.

C'est ainsi que le 1er de chaque mois, je m'entretiendrai avec un blogueur (que j'aime bien sûr) pour parler un peu de ce que qui nous passionne tous: les bouquins, la blogo, les blogueurs. Le Comment, le Pourquoi et le Parce que d'un média auquel finalement je reste très attachée.

Et j'ai eu la chance, pour amorcer ce rendez-vous, d'avoir l'accord d'un blogueur suffisamment influent (pour que je puisse lui poser mes questions tordues), suffisamment bienveillant (pour accepter que je les lui pose), et de suffisamment mesuré (pour ne pas se disputer avec tout le monde au premier rendez-vous). C'est donc avec Jérôme d'une Berge à l'autre qu'on va se regarder le nombril, Jérôme qu'on ne présente plus (et sûrement pas sur ce blog), celui qui fait partie de cette minuscule poignée d'hommes dans ce monde de femmes, dont une blogueuse itinérante dit "qu'il est une blogueuse presque comme les autres" (tout est dans le "presque", surtout depuis qu'il a coupé ses cheveux), mais surtout qui a le grand mérite d'être loyal et honnête, et aussi de supporter (et même d'encourager) la sale gaminerie je suis.

Merci à lui de se prêter au jeu. 

1- Trois mots de présentation

Je suis un homme de 40 ans. Marié, papa de trois filles de 2, 9 et 12 ans. J’habite dans l’Oise et je suis professeur documentaliste au sein du réseau CANOPÉ (je suis en fait responsable d’une médiathèque pédagogique à destination des enseignants et je mène en parallèle des actions autour de la lecture dans les écoles primaires et les collèges).

2. Le blog

Jérôme est-ce que c’est indiscret de te demander quelle a été la petite étincelle qui a mené à l’ouverture d’une berge à l’autre ? Certains assument que c’est par désoeuvrement, d’autres parce qu’ils ont eu envie d’avoir un coin à eux, ou bien un rapport avec le travail etc

La raison première du blog était une volonté de garder une trace de mes lectures, de faire de cet espace une sorte de pense-bête. Au départ c’était une démarche purement égoïste, sans aucune ambition de partage ou d’échange. D’ailleurs si tu regardes mes premiers billets tu verras que je ne répondais jamais aux rares commentaires. Je n’en avais rien à faire en fait, j’écrivais mes avis pour moi et je ne pensais pas une seconde qu’ils puissent intéresser qui que ce soit. Les premiers mois, je ne fréquentais pas du tout la blogo, j’étais un ours bien au chaud dans sa caverne sans aucune envie d’en sortir.

Par la suite j’ai appris à découvrir la richesse qui m’entourait, d’abord chez ceux qui prenaient régulièrement le temps de venir sur mes berges, puis le cercle s’est élargi. Cela s’est fait naturellement, j’ai compris que les autres avaient beaucoup à m’apporter par la diversité de leurs lectures et de leurs avis, par la diversité de leurs écritures aussi. Mais au départ je n’ai pas du tout créé mon blog dans ce but-là.

3-  Pratique du blog.

Combien de temps passes-tu chaque jour (ou chaque semaine) dessus ? Combien de blogs suis-tu, à partir de quel agrégateur, ou facebook, ou au hasard des clics. Ta gestion de réponses aux commentaires. Es tu d’accord pour donner ton nombre de visites ou c’est black-out sur les stats ? Comment fait-on pour être un blogueur régulier avec un métier et une petite famille ? Le temps du blog, il empiète sur quoi ?

Le temps que je passe par jour sur le blog est assez réduit. En général je prends 15-20 minutes le midi pour répondre aux commentaires et 45 minutes le soir pour écrire un billet. J’ai la chance d’écrire vite (je n’ai pas dit bien, hein !), ce n’est jamais contraignant pour moi de faire un billet. Je fais les choses sérieusement mais sans me prendre la tête non plus, et tant pis si cela se sent parfois…

J’ai une centaine de blogs dans mon Netvibes, c’est le seul agrégateur que j’utilise quotidiennement.

Pour les commentaires, j’y réponds rarement le jour de publication du billet. Je laisse toujours passer quelques temps, mais il n’y a aucune règle en fait.

Concernant les stats, il n’y a pas de black-out, j’ai passé l’âge de jouer à qui a la plus grosse. Blogger me dit que j’ai entre 700 et 800 pages vues par jour, avec des pointes à 2000 et des creux à 400. C’est variable, je ne sais pas si c’est énorme ou ridiculement faible par rapport à d’autres, ce n’est pas quelque chose qui m’intéresse à vrai dire. Je constate juste que ces chiffres n’augmentent plus depuis au moins un an, qu’ils auraient même tendance à baisser un peu. Mais franchement, c’est le dernier de mes soucis.

Le temps du blog n’empiète pas sur grand-chose. En semaine, je profite de ma pause du midi pour aller lire les blogs de mon netvibe et répondre à mes commentaires et le soir, quand les filles sont couchées et que madame regarde la télé, je m’autorise une petite heure pour faire un billet. Le week-end le rythme est différent, ma femme est une grosse dormeuse et moi pas, donc je m’occupe de bébé qui est une vraie lève tôt et je suis souvent au taquet vers 6h30. Mais une fois qu’elle est changée et qu’elle a bu son biberon, elle a pris l’habitude de jouer toute seule en attendant le réveil de ses grandes sœurs. J’ai donc souvent deux heures devant moi dans une maison tranquille, j’en profite pour lire et bloguer.

4- Le blogueur et toi

Jérôme, tu as choisi de ne pas prendre de pseudo (à moins que tu avoues ne pas t’appeler Jérôme IRL). Quel est ton rapport avec le Jérôme virtuel ? Tu es un blogueur populaire, apprécié par les blogueuses de tous âges, tu n’es pas sans ignorer que tu passes pour le chouchou de ces dames de la blogo. Bref virtuellement, tu es un homme à femmes, et ceux qui te connaissent un peu savent qu’IRL tu as aussi beaucoup de femmes dans ta vie (ne serait-ce qu’avec tes filles ou ton épouse). Alors le Jérôme d’une berge à l’autre est-il un Jérôme amélioré ou te ressemble-t-il? Es-tu aussi bienveillant dans la vie que sur la Toile ? Et comment perçois-tu l’image que tu renvoies ?  Jusqu’où peut-on aller avec la volonté de transparence ?

Je n’ai pas pris de pseudo parce qu’au départ ce blog ne s’adressait qu’à moi et qu’il n’était censé intéresser que ma petite personne.


La popularité, le chouchou de ces dames, tout ça, tout ça, tu sais à quel point j’ai horreur de cette image ! J’ai toujours dit que les choses seraient bien plus simples si j’étais une femme, malheureusement ce n’est pas le cas. Maintenant est-ce que le Jérôme virtuel est LE vrai moi ? Bien sûr que non. C’est un personnage, un petit bout de moi forcément tronqué mais sûrement pas amélioré. Ce n’est pas une vitrine, je ne suis pas là pour me vendre ou jouer un quelconque jeu de séduction à travers lui. J’ai dit des choses très personnelles et très sincères sur le blog, d’autres enjolivées, et d’autres encore bien moins reluisantes qu’elles ne l’étaient en réalité. Je joue un peu avec ce personnage, il serait stupide et malhonnête de le nier. Mais il me ressemble dans une certaine forme d’autodérision, une bonne dose de mauvaise foi, une absence d’orgueil et d’amour propre, une modestie et une forme de gentillesse à toute épreuve qui reflète assez bien ce que je suis dans la vraie vie. Et puis mon moi virtuel a fait grandir mon moi réel, notamment dans le rapport aux autres. Je ne vais pas m’étendre sur ton divan pour entamer ma première séance de psychanalyse, mais je crois que tu auras compris ce que je veux dire.

A part ça je ne perçois pas du tout l’image que je renvoie, heureusement que de bonnes âmes le font à ma place et m’ont plus d’une fois ouvert les yeux. Le regard des autres n’est pas un paramètre que je prends en compte quand je m’exprime sur le blog, heureusement d’ailleurs, je n’ai pas envie de me prendre la tête avec ce genre de considération.

5  -    Le blogueur et le lecteur

Tu sais que tout donneur de leçons qui se respecte (je sais que quoi je parle hein) milite pour les librairies indépendantes, tape sur Amazon et s’insurge sur l’achat des bouquins en grandes surfaces. Mais il me semble que tu m’as dit un jour n’avoir plus de librairie dans ta ville. Alors, où, comment et à quelle fréquence achètes-tu tes livres ? Est-ce tu empruntes un peu, beaucoup, à la folie ? (je sais aussi que tu offres beaucoup).

Ma ville préfecture de 60 000 habitants est restée deux ans et demi sans aucune librairie. Étant un très gros acheteur de livres, j’ai dû passer nombre de commandes en ligne. J’ai aussi la chance d’aller régulièrement à Amiens et j’y fais toujours des emplettes, notamment dans une excellente librairie BD. Depuis septembre dernier les choses ont évolué puisqu’une petite FNAC a ouvert ses portes en ville et qu’à l’automne prochain Le Furet du Nord doit s’installer dans un méga centre commercial actuellement en construction. L’offre va donc redevenir tout à fait correcte et il ne sera plus question pour moi de commander en ligne, sauf les livres d’occasion. J’emprunte aussi beaucoup à la médiathèque et j’ai la chance de recevoir pas mal de livres en cadeau (et je ne parle pas ici des SP !). J’accepte aussi de recevoir quelques livres voyageurs mais en général je les « séquestre » bien trop longtemps, j’en profite pour m’excuser auprès de celles qui m’ont envoyé des ouvrages et qui attendent encore que je leur rende.

6-  Le blogueur et le monde du livre (où la question qui gratte)

Alors on ne va pas se mentir, ton blog est populaire, et pèse lourd dans la blogo. Tu es dans le top 5 d’ebuzzing, et même si les mauvaises langues (dont je suis) disent que ce classement ne veut rien dire, il suffit de parcourir ton blog pour voir qu’il est très suivi, tes billets reçoivent toujours autour d’une vingtaine de commentaires (avec pourtant un rythme de publication soutenue), alors forcément, des attachés de presse ont du te contacter pour des partenariats. Le blogueur et les Services de Presse c’est tabou ? On en parle ? En chemise avec les attachés de presse où carrément opposé aux partenariats ? Qu’en est-il des choix des lectures quand le livre arrive directement dans sa boîte aux lettres ? Quand on connaît un auteur est ce qu’on modère ses bémols ? Est-ce que c’est important d’être reconnu par les maisons d’édition ? Un blogueur est-il un professionnel de la littérature ? As-tu déjà demandé des romans avant qu’on ne te les propose. Je ne crois pas à la théorie de recourir aux partenariats pour économiser une vingtaine d’euros par roman, alors qu’en est-il des liens qui se créent entre éditeurs, romanciers et blogueurs ?
Le blogueur et les Services de Presse on en parle autant que tu veux, je suis très à l’aise avec ça.

D’abord mon blog ne pèse rien du tout pour le monde du livre et ce n’est absolument pas de la fausse modestie. C’est un paramètre essentiel à garder en tête et j’y tiens beaucoup. Après, le classement dont tu parles, et qui ne reflète absolument pas la réalité selon moi, est un outil très utilisé par les maisons d’édition. Donc, oui, je reçois beaucoup de propositions. Et j’en accepte certaines. Je ne suis pas « en chemise » avec les attachées de presse mais je ne suis pas du tout opposé au partenariat. Surtout, ça ne changera jamais ma perception du livre, mon ressenti et la manière dont je vais l’exprimer. Volontairement, je ne précise jamais dans mes billets si le livre vient ou pas d’un partenariat (c’est une obligation légale, je sais, mais peu m’importe) parce que pour moi il n’y a aucune différence dans ma façon de l’aborder. Un livre reçu en SP ne passera pas avant les autres, il attendra son tour, comme tout le monde. Et d’ailleurs, il y en a bien une trentaine sur mes étagères qui y resteront sans jamais être lus, tu vois à quel point je traite les envois de SP avec le plus grand sérieux ! Mes choix de lectures sont uniquement dictés par mes envies du moment ou par des lectures communes à venir. Encore une fois, je ne me prends pas la tête avec ça, le blog reste pour moi un espace de liberté et de légèreté ou je fais ce que je veux, comme je veux, et à mon rythme.

Je demande souvent à recevoir des romans avant qu’on ne me les propose, ça ne me pose aucun souci de l’avouer. Et encore plus souvent, quand une maison d’édition me propose un titre, je le refuse pour en demander un autre de leur catalogue qui m’attire davantage. En général ça ne pose pas de problème et ça me permet de découvrir un ouvrage que j’ai choisi moi-même.

Il n’est absolument pas important pour moi d’être reconnu par les maisons d’édition, il ne manquerait plus que ça ! La seule chose qui importe est ma crédibilité de lecteur, le fait que quand je m’emballe totalement pour un livre (ce qui arrive rarement), mon avis incite certain(e)s de mes lecteurs(trices) à me faire totalement confiance et à le lire. Je perdrais tout ce qui fait le sel du blog à mes yeux si je perdais cela un jour. Alors que perdre des partenariats, franchement, peu importe.

La relation avec les auteurs, notamment via les réseaux sociaux, est beaucoup plus problématique selon moi. Quand il s’installe une forme de connivence entre le blogueur et un auteur, le jugement est forcément biaisé. Je refuse systématiquement les offres de SP venant directement des auteurs (j’ai fait une exception une fois, parce qu’elle a su si prendre et que je suis faible, mais ce n’était pas un roman pour moi et je l’ai dit sans problème dans mon billet), c’est à peu près le seul principe auquel je ne veux pas déroger. J’ai refusé aussi que l’on me paie pour écrire un avis élogieux, comme j’ai refusé des propositions de partenariats pour des produits qui n’avaient strictement rien à voir avec le monde du livre. Après, chacun fait ce qu’il veut et heureusement.

7-  Le blogueur et l’écriture

Le blogueur écrit pour son blog, pour lui…et sinon, est ce qu’il envisage d’écrire pour de vrai ? Certains le cachent, certains l’affirment, d’autres se déclarent auteurs. A force de parler des romans des autres, est ce qu’on aurait envie d’écrire le sien propre ? Je sais que tu t’y es tenté une fois, c’est définitivement derrière toi ou tu continues de t’exercer dans ton coin ?

Je m’y suis essayé une fois, c’est vrai, mais c’était plus une blague qu’autre chose (une nouvelle érotique pour célébrer l’anniversaire d’un rendez-vous de la blogo que j’apprécie particulièrement). Sauf que cet essai-boutade sans autre ambition que celle de faire un petit clin d’œil a déclenché des réactions auxquelles je ne m’attendais pas du tout avec notamment des témoignages en « off » qui m’ont plus effrayé qu’autre chose. Je vais même t’avouer que j’ai été contacté par une maison d’édition qui m’a proposé d’écrire un petit roman suite à ce texte. J’ai décliné sans aucune hésitation, l’écriture « fictionnelle » ne m’intéresse pas du tout, c’est bien trop contraignant et trop fatigant pour un dilettante comme moi. Et puis je manque d’imagination pour inventer et raconter des histoires. Donc, non, je ne continue pas à m’exercer tout seul dans mon coin (du moins pas à l’écriture…).

8-  Le blogueur et le réel

Est-ce qu’il est, selon toi, nécessaire de passer par une rencontre physique pour solidifier une relation entre blogueurs ? La frontière entre le virtuel et le réel est-elle hermétique, ténue ou friable ? Sans forcément donner des noms (quoique) n’as-tu eu que de belles découvertes ou bien y-a-t-il eu franches déceptions ?

Alors là je te dis oui, trois fois oui, il n’y a rien de telle qu’une rencontre physique (en tout bien tout honneur) pour solidifier une relation entre blogueurs ! Les rencontres réelles m’ont permis de créer de véritables liens d’amitié. Certaines d’entres elles sont aujourd’hui bien plus que des blogueuses, (et je n’ai pas besoin de donner de noms, elles sont très peu nombreuses et se reconnaîtront sans aucun problème).  Après, je n’ai pas eu de franches déceptions, juste des personnes avec lesquelles je n’ai pas senti d’affinité particulière, rien de grave au final.


9-  Le blogueur et les réseaux sociaux

Indubitablement une blogo parallèle se met en place sur FB, Twitter ou IG. On se met à discuter tous azimuts de tout et n’importe quoi, avec plus ou moins d’amis. Il se murmure que l’échange sur FB serait plus intéressant et dynamique que celui des blogs. Tu crois à la résistance du blog où à sa dilution dans l’échange immédiat ?

L’échange sur FB est plus direct et plus réactif mais il est aussi beaucoup plus « soluble ». Sa durée de vie ne dépasse en général pas les 48h, et encore, je suis optimiste. L’échange immédiat n’a rien à voir avec le blog pour moi. Le blog permet déjà de toucher un public plus large que tes quelques amis FB (en ce qui me concerne en tout cas parce que je n’en ai pas tant que ça) et la réflexion que l’on y propose est plus dense et plus structurée. La trace que tu y laisses est aussi bien plus durable selon moi, elle ne va pas être noyée et parasitée par les dizaines d’autres informations qui s’affichent en permanence sur les murs des uns et des autres. Après, les réseaux sociaux sont utiles pour la visibilité du blog, c’est indéniable, mais c’est une autre question…

10- De quelle couleur est Jérôme d’une berge à l’autre?
Interdiction de mettre « arc en ciel », c’est trop consensuel, mais je prends toutes les autres du jaune citron au marron glacé en passant par le bleu pacifique. Et pour justifier ta couleur, je veux bien que tu nous donnes les 3 livres sans lesquels tu ne serais pas tout à fait le même lecteur et peut être pas le même homme non plus ?

J’aurais bien dis arc en ciel mais je n’ai pas le droit, tant pis… Blague à part, je crois que je suis plutôt gris. J’aime cette couleur qui me rappelle le ciel bas et chargé de ma Picardie natale. J’aime les âmes grises, la tristesse, la mélancolie, le blues. Je trouve qu’il y a une certaine lucidité à voir la vie en gris, entre le noir le plus sombre et le blanc le plus pur, entre l’obscurité et la lumière. (Mince, j’ai un peu l’impression d’avoir plombé l’ambiance. Remarque, vu comme j’ai été bavard, pas certain qu’il reste beaucoup de lecteurs ayant fait l’effort de tenir jusqu’à cette question).

Les trois livres sans lesquels je ne serais pas tout à fait le même lecteur ni le même homme ? N’importe quel recueil de nouvelles de Bukowski pour commencer. Ensuite le « Biribi » de Georges Darien, brûlot antimilitariste qui a fait de moi un objecteur de conscience et, par ricochet, m’a permis d’exercer le métier qui est le mien aujourd’hui (c’est une longue histoire…) et enfin n’importe quel recueil de poésie d’André Laude, âme grise s’il en est qui restera le seul poète a m’avoir ému aux larmes avec la force de ses mots.

Le mot de la fin est pour toi (aucune consigne, c’est totale liberté ;-)


J’ai été très touché (et surpris) que tu me proposes d’être le premier invité de ce rendez-vous. J’espère avoir respecté l’esprit de transparence et de sincérité que tu souhaites lui donner. En tout cas ce fut pour moi un vrai plaisir de répondre à tes questions. Et je m’arrête là, j’ai déjà été bien trop long.

Merci Jérôme ;-)

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