Anouk Markovitz, Je suis interdite, J-C Lattès, 2013, 350 p. |
Le roman commence avec l’horreur de la traque et l’assassinat massif des juifs d’Europe de l’Est, dont deux enfants rescapés, Josef et Mina, issus tous les deux de familles juives hassidiques seront le fil conducteur.
Mais ce n'est pas un livre qui pleure le sort des juifs, c'est un roman qui dénonce l’orthodoxie religieuse (en l'occurrence les hassidiques). On y trouve des personnages masculins qui ont peu de chance d’être aimés par un lecteur et aucune d'être appréciés par une lectrice. La palme revient à Zalman (le père de famille qui recueille Josef et Mina), qui est aussi inquiétant qu’obtus, à la fois dictateur domestique et détenteur de la vérité universelle.
Le Rebbe (chef spirituel des hassidiques) se défend bien aussi, puisqu'il négocie, en pleine traque, son sauvetage en laissant ses ouailles à leur sort. Markovitz montre à quel point même cette trahison des siens est pardonnée par une communauté aveugle qui y voit une volonté divine.
Le Rebbe (chef spirituel des hassidiques) se défend bien aussi, puisqu'il négocie, en pleine traque, son sauvetage en laissant ses ouailles à leur sort. Markovitz montre à quel point même cette trahison des siens est pardonnée par une communauté aveugle qui y voit une volonté divine.
Parce que dans cette communauté mal connue (de moi en tous les cas), il n'existe ni libre-arbitre ni liberté individuelle. Markovitz dénonce un fondamentalisme qui va jusque dans la couche conjugale dicter sa loi (d'où le titre). Et si les femmes ont le droit d'apprendre, ce qui est déjà un privilège, c'est uniquement la pensée unique dispensée dans des établissements encadrés et sans aucune ouverture sur le monde.
Une fois devenus adultes, Josef et Mina se marient. Et c'est à ce moment que j'ai senti bouillir un fond de colère. Parce que Mina se croit stérile dans une communauté qui ne fait de la
femme qu'un moyen de s'agrandir. Mina était tellement passive face à la tradition que je lui préférais de loin son amie Atara, fille de Zalman (pauvre enfant!). La jeune Atara va en cachette à la bibliothèque, lit les journaux dans l'ombre, essaie de comprendre le monde. Mais elle fuit la communauté et disparaît du roman. Même si on la retrouve à la fin, on ignore tout de son parcours.
Le problème chez Markovitz, c'est qu'il n'y a pas de réconciliation possible :Mina est le ventre et Atara l'esprit.
Il manque malheureusement quelque chose dans ce roman, un supplément qui m'aurait permis de m'attacher aux personnages, de me relier à eux. La froideur, la description chirurgicale des us et coutumes hassidiques, la colère et la rage de la romancière sont telles que je suis restée en dehors de l'histoire. Pourtant, Je suis interdite (qui n'a aucune chance de gagner le prix) fait partie de ces ouvrages importants qui dénoncent le sort des femmes dans les communautés repliées sur elles-mêmes et je comprends que Fleur, à contre-courant de la plupart des jurées Elle, en ait fait un coup de coeur (parce que même deux mois après l'avoir achevé, j'en garde encore un souvenir très précis).
Il manque malheureusement quelque chose dans ce roman, un supplément qui m'aurait permis de m'attacher aux personnages, de me relier à eux. La froideur, la description chirurgicale des us et coutumes hassidiques, la colère et la rage de la romancière sont telles que je suis restée en dehors de l'histoire. Pourtant, Je suis interdite (qui n'a aucune chance de gagner le prix) fait partie de ces ouvrages importants qui dénoncent le sort des femmes dans les communautés repliées sur elles-mêmes et je comprends que Fleur, à contre-courant de la plupart des jurées Elle, en ait fait un coup de coeur (parce que même deux mois après l'avoir achevé, j'en garde encore un souvenir très précis).