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lundi 15 février 2016

En chantant : Photo du Mois #14

Ce mois-ci, c'est Thalie qui a choisi le thème avec une petite fantaisie : il s'agit de faire deviner le titre d'une chanson à partir d'une photo.

Théoriquement, la chanson devrait se lancer à l'ouverture du billet, mais à mon avis ça ne marchera pas, donc je mettrai dans la journée le titre en question.



Allons voir comment mes camarades ont choisi leur photo en chantant:
Koalisa, Aude, Alexinparis, Voyager en photo, Autour de Cia, Rythme Indigo, Cécile, Noz & 'Lo, Testinaute, Woocares, J'habite à Waterford, Lau* des montagnes, Milla la galerie, Sous mon arbre, KK-huète En Bretannie, Gilsoub, Chiffons and Co, Thalie, Tambour Major, Mirovinben, Nanouk, Tuxana, Krn, Giselle 43, Danièle.B, Renepaulhenry, Les bonheurs d'Anne & Alex, Céline in Paris, Loulou, Champagne, DelphineF, Mamysoren, Pixeline, Julie, Mimireliton, Mon Album Photo, MauriceMonAmour, Morgane Byloos Photography, Guillaume, Laulinea, magda627, A'icha, Calamonique, Lyonelk, Chloé, Marie, El Padawan, Lavandine, Dr. CaSo, Pilisi, François le Niçois, Homeos-tasie, Cara, Chat bleu, Blogoth67, Josette, CécileP, AF News, Xoliv', Eva INside-EXpat, Cricriyom from Paris, Dom-Aufildesvues, Dame Skarlette, Estelle, Laurent Nicolas, Nicky, Luckasetmoi, Angélique, Lavandine83, Galéa, Alban, Brindille, BiGBuGS, Mireille, Cocazzz, MyLittleRoad, Carole en Australie, Sinuaisons, La Fille de l'Air, Philisine Cave, Suki, Christophe, Pat, E, Frédéric, Akaieric.

Edit de 18h55: vu comment j'ai été moyennement inspirée ce mois-ci, voici la chanson qu'il fallait trouver : Partons vite de Kaolin qui me met en joie à chaque fois et dont les paroles n'ont rien à voir avec la photo (#LooseDeFévrier #ChutedHormones)

vendredi 12 février 2016

My darling Third: le débarquement.

Il y a d'abord eu la sage-femme qui n'en revenait pas de me voir encore là, pitoyablement échouée sur le canapé de la salle d'attente, cernée jusqu'aux joues, boudinée dans un jean de grossesse qui avait  lui-aussi renoncé à aller aussi près du terme.

-" Mais quand même, on n'a pas idée de vous voir encore là à la 41ème semaine, un troisième on ne le mène pas au bout, sans compter qu'avec la grippe des filles et vu comment vous aviez l'air claqué, je pensais que vous auriez accouché ce week-end, vous habitez toujours au 3ème sans ascenseur ?"

Il y a eu le monitoring presque trop parfait, la boîte d'aiguilles d'acuponcture, la vérification du col et (attention je vends du rêve) le décollement de membranes  :
 "Dès que ça commence, par contre, ne traînez pas trop quand même hein, au troisième ça peut aller très vite". 

Et ça a commencé à 12h30 avec un Homme pas joignable avant 14h30. Il y a eu ma mère en renfort,  transformée en coach, qui m'a fait un steak et des pâtes "des sucres lents, c'est le secret de la résistance à l'effort". Il y a eu deux bombes parisiennes qui m'ont tenu compagnie sur Messenger autour de questions de fond: à quoi reconnaît-on un vrai travail ? dois-je me démaquiller avant d'entrer en salle ?  Le prénom fait-il l'Homme? Il y a eu une petite Madeleine de 4 mois qui m'encourageait depuis son transat.


Il y a eu la répartition des tâches, des clefs, des filles, des activités. Tel un chef de camp à l'agonie, j'ai donné mes instructions aux uns et aux autres (sans que personne ne me contredise). Je n'ai cédé sur rien. Psychorigide un jour, psychorigide toujours.

"Et surtout, Numérobis doit faire pipi AVANT son cours de violoncelle, même si elle dit qu'elle n'a pas envie."

Il y a eu l'arrivée de l'Homme, pas franchement stressé, qui a pris le temps de se doucher,  de vérifier son paquet de cigarettes, de prendre des rations de survie "au cas ou" (traumatisé par les 16h qu'il me fallut pour Rayures, pendant lesquelles il a failli mourir de faim), et la charge de son portable. Au passage, il m'a livré son diagnostique médical :  "à mon avis, on part trop tôt Galinette" (oui ok, mais on va y aller quand même hein).

Il y a eu la descente pénible des trois étages avec des voisins perspicaces  : "ah c'est maintenant alors? Elle contracte? " (non, non elle joue au tennis).

Il y a eu l'arrivée à la clinique, et l'Homme, complètement punk, qui se gare sur une place dépose-minute : "ta sage-femme a dit que ça irait vite non" (rire gras..vraiment pas stressé l'Homme)

Il y a eu ma gynécologue qui n'est jamais venue:
 "Rho vous n'avez vraiment pas de chance, elle a eu un décès dans sa famille, elle est à un enterrement à Paris. Si vous y allez cool, c'est jouable, elle sera de retour vers 20h00".  
Il est 17h et clairement j'ai commencé le travail :  loose toujours. 

Il y a eu l'anesthésiste :  "vous continuez à vous agiter comme une enfant dès que j'approche l'aiguille, je vous préviens vous accouchez sans péri, c'est pas possible ça, punaise!!!" . Je suis dilatée à 5 et je fais des incantations vaudous contre elle : "ah bah voilà, j'ai ripé, bravo hein, une compresse!!!" , là dessus j'entends la sage-femme : "oh oui dis donc elle saigne bien"; je m'imagine paralysée à vie et suis au bord de l'évanouissement. J'arrête les incantations, j'essaie de penser positif, ou de ne pas penser du tout, de toute manière je vais faire un malaise. 

Il y a donc eu la chute de tension au moment où l'Homme, triomphant, revenait en salle de travail avec charlotte, blouse et chausson bleu clairs:  "punaise, j'ai ta chambre individuelle, j'ai été au top, même pas eu besoin de brandir tous les arguments que j'avais révisés" . C'était sa mission du jour, il n'en peut plus de fierté. Là dessus, je lui réponds que je suis en train de mourir, que je sens mon âme quitter mon corps. "T'inquiète, à chaque fois ça te fait ça après la péri" (vraiment vraiment pas stressé du tout). "Non je vais mourir". Une Sage femme qui passait par là bougonne: "pffff au maximum vous allez vomir, faut pas exagérer non plus". On m'injecte un truc dopant, je reprends mes esprits, et me demande si mon eye-liner a tenu le choc ou pas. 

J'entends deux sage-femmes discuter "c'est son premier à la dame? " "Son troisième je crois" "Nan ? et ben dis donc!!!!" C'est officiel, je suis un super boulet. Mais bon, faut bien se mettre au travail hein!

Et à 19h16,  il y a eu My Third :  toute ronde, toute brune, toute calme.

Ensuite, il y a eu l'Homme et ses réflexions profondes, "oh punaise, c'est Rayure je te jure, la tête de Mike Tyson....par contre quand elle hurle c'est Numérobis". Il y a eu les 200 photos prises de son téléphone, les faux prétextes pour sortir "c'est ta soeur, elle veut des nouvelles, je reviens" (en fait il part fumer une cigarette, manger un kit-kat et boire un café-machine). 

Il faut nous voir tous les deux:  l'Homme, plus sel que poivre, touchant presque sa quarantaine, et moi,  la jambe bleue comme une carte routière, le brushing en berne, la frange frisée, le périnée en deuil, les yeux pochés par mon mascara pas waterproof. On sait tous les deux que c'est la dernière fois qu'on vit ça, du coup, l'Homme se fait une orgie de sociabilité, rigole avec tout le monde, tente des blagues pas toujours pertinentes et fait des selfies assez moches (une puéricultrice de l'équipe de nuit le prend en pitié et propose de prendre une photo : la seule convenable de la soirée).

Bref, Ma Third a débarqué le jour de la Chandeleur et tient toutes ses promesses (surtout que maintenant on peut le dire, même la troisième fois, on n'est jamais certaine d'être à la hauteur du rôle quand même).

Et depuis il y a :
- un bazar incroyable dans mon appartement trop petit, 2 petites filles qui me paraissent géantes, bruyantes et brutales, deux machines de linge par jour, des envies de cafés, d'alcool, de cigarettes, des arheu, des pesées régulières, des nuits qui n'en sont pas, des réserves de couches, les bastons des filles, le cordon qui tombe, la déclaration à la CAF, les textos des copines, des cadeaux, les faire-parts à envoyer, des ressemblances décrétées par des gens qui ne nous connaissaient pas enfant, nos grands principes qu'on renie déjà (genre: avec elle, on ne cédera rien sur le sommeil), une écharpe retrouvée au fond d'un placard, des heures à la regarder dormir puis se réveiller, du liniment sur les doigts.

My Third a débarqué: fin du voyage en tandem. Elle et moi aurons surmonté le décollement du placenta, une tempête familiale, le désespoir des attentats du 13 novembre, la grippe de Numérobis, les réflexions de l'échographistes, mon hypocondrie. Sans nous vanter, elle et moi avons bien travaillé, et ça me fait quelque chose qu'elle commence sa route toute seule (enfin... manière de parler car, à ce jour, je ne laisse pas grand monde l'approcher et je ne m'éloigne jamais à plus de 1 mètre d'elle). 

En vérité, le 2 février dernier, l'essentiel de ce qui s'est passé ne se raconte pas dans un billet de blog, car je n'ai pas le talent pour parler de cette intimité-là, de ce quelque chose qui tient finalement à un regard, à l'odeur du lait, à un petit front plissé. Cette évidence presque animale qui se résume à la main minuscule qui s'agrippe , à la peau contre la peau, à l'oeil qui peine à s'ouvrir. Ce qui s'est passé de plus important il y a 10 jours va rester entre My Third et moi, enfin surtout entre moi et moi au final.

Mais bien sûr je répondrai toujours présente quand il s'agira de se plaindre de la fatigue, du manque de places en crèche et de tout le travail que j'ai à la maison. Je ne lâche rien (geindre sur tout, tout le temps est mon fond de commerce, je l'ai je le garde), et je reviens très vite avec la Photo du Mois, Alamut  et Azoulay (la romancière hein ! #HumourPolitique), et j'essaierai de reprendre le chemin des blogs dans la foulée.

PS: En parlant de blog et de blogueurs, merci du fond du coeur à tous les amis virtuels qui se reconnaîtront, et qui, sans nous connaître ni l'une ni l'autre (ceci expliquant sans doute cela d'ailleurs), nous ont accompagnées pendant toutes ces semaines, chouchoutées, gâtées, rassurées ou fait rigoler. Je mesure notre chance d'être à ce point entourées.