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jeudi 30 octobre 2014

Au revoir là-haut- Pierre Lemaître

Pierre Lemaitre, Au revoir là-haut
Albin Michel, 2013, 568 p.

Une histoire de Première Guerre mondiale, l'année de centenaire de la déclaration, c'était bien vu.

Reçu à Noël comme la plupart des lecteurs, juste après son prix Goncourt, Au revoir là-haut attendait patiemment sur ma table de chevet. Il avait fait couler beaucoup d'encre avant même que je l'ouvre. Il y a eu les fans de Lemaître, les détracteurs, les puristes etc...À un moment il faut se faire son propre avis.


Et bien sûr, je me suis régalée.

Au revoir là-haut : une arnaque entre ombre et lumière

En trois mots, ce sont les parcours croisés d'anciens combattants qui escroquent l'État sur le commerce de la mort après l'Armistice. Alors dit comme ça, ça fait moyennement envie, mais ça marche drôlement bien.

D'abord, j'ai aimé le duo improbable des deux anti-héros. Édouard, défiguré à vie, fils de notable, artiste, délaissé par son père. Et, coïncidence éditoriale oblige, cet Edouard Péricourt résonne avec un certain Eddy qui a beaucoup fait parler de lui cette année, et ça c'est l'un des petits bonheurs des hasards littéraires.

"Edouard avait une voix trop haut perchée, il était trop mince, trop soucieux de sa mise, il avait des gestes trop...Ce n'était pas très difficile à voir, il était vraiment efféminé" (p.189)

Son compère, Albert a aussi tout pour me plaire: il est névrosé à l'extrême, petit comptable, d'origine modeste mais grandiose dans sa loose, et castré par sa mère. Ces deux-là forment une équipe aussi imaginative que pathétique, dissimulée au monde, dont même les identités ont bougé. Ils vendent, eux les fracassés des tranchées, des monuments funéraires qu'ils ne fabriqueront jamais. Ce sont les anti-héros positifs, le côté lumineux de l'arnaque en quelque sorte.

Pour le côté sombre, c'est le personnage d'Aulnay-Pradelle qui constitue un pur bonheur littéraire. Fin de race désargenté, qui n'a de noble que sa particule, sans honneur, sans parole et sans scrupule, il est coincé dans son château en ruine. Sa grande beauté le rend aussi attirant que veule, et franchement c'est délicieux. 

Évidemment, il y a des fils tenus qui rattachent les personnages les uns aux autres, et parmi eux, Madeleine, sœur d'Édouard, femme de Pradelle, qui est un personnage formidable qui rassure toutes les filles moyennes du monde.

 "Pas laide vraiment, banale, mais à un âge où être banale, c'est être moins jolie que beaucoup d'autres" (p.200). 

Tourner la mort en dérision

Personne n'est honnête dans cette affaire:  on laisse des gens fracassés par une guerre se débrouiller tous seuls, on biaise la mémoire des morts, on renie sur la taille des cercueils. Lemaître dénonce ce qu'il y a de plus mesquin et arriviste dans la nature humaine. Il se moque de tout cela avec brio, mais ce n'est pas une ode à la malhonnêteté, ni un éloge de l'escroquerie.

Car il y a ce personnage merveilleux et repoussant, ce fonctionnaire aigri, qui sent mauvais, qui mange mal, auquel on ne s'attache pas. Mais par sa grandeur d'âme et son incorruptibilité, il nous rappelle que l'honnêteté n'est pas glamour, et qu'être fidèle à ses principes est à la fois grandiose et vain, et c'est peut- être ça le plus beau. L'élégant du roman c'est lui.

Il y a aussi, de magnifiques pages sur la relation père-fils, qui font pleurer d'émotion (moi qui ne suis pas père et qui n'ai pas de garçon), des passages formidables sur les disparitions, les regrets, les gens qu'on a aimés sans le savoir.

Rassembler tous les ingrédients d'une saga

On voit surgir au fil des pages des personnes qu'on retrouvera surement. La petite Louise par exemple : une gamine vive, attachante, intelligente qui va au-delà de la gueule cassée qui fait peur. On la retrouvera en 1940, dans un prochain opus, (oui Lemaître l'a dit, et ça tombe bien c'est ma période de prédilection), je subodore donc une grande fresque sur le XXe siècle, avec des superbes personnages, décalés et profonds.

On a beaucoup glosé sur le style de Lemaître, en le trouvant un peu faible pour un Goncourt. Là, je m'inscris en faux car je trouve sa plume réjouissante, vive et drôle. 

Rien que son incipit est formidable : "Ceux qui pensaient que cette guerre finirait bientôt étaient tous morts depuis longtemps".

Réjouissons nous qu'un livre pareil ait obtenu le Goncourt ainsi qu'un succès populaire. Ce n'est pas si fréquent. Même l'Homme qui lit deux livres pas an (de la SF ou du polar généralement) l'a lu et aimé. 

Alors, en ces temps où la littérature peine à se faire une place, je trouve qu'il est bon de saluer un livre qui plaira au plus grand nombre, en tirant vers le haut (justement) les lecteurs occasionnels qui vont s'avaler un gros pavé, avec humour, distance et gravité.

mercredi 22 octobre 2014

24 mois: la loose, Galéa et moi

Aujourd'hui, ça fait deux ans que je blogue.

Bon.

C'est ballot, ça tombe à un moment où je ne suis plus spécialement motivée, sûrement à cause des blogs qui ferment, du manque de temps, de l'automne, d'une lassitude, de ma vue qui baisse, du changement des rythmes scolaires, de la fin du  fromage le Palet chez Président, de la disparition de mon démaquillant chez Monoprix, du pic de croissance de Numérobis, de la crise...

Que sais-je encore, tous les prétextes sont bons ....

N'étant pas naturellement encline à fêter les anniversaires (ni Noël d'ailleurs...#boutentrain!), je me suis dit que j'allais plutôt évoquer mes doutes existentiels, et préciser deux ou trois points totalement personnels et égocentriques 

La loose d'abord, celle dont j'ai fait mon fond de commerce depuis deux ans (on fait avec ce qu'on a ceci-dit). Alors soyons clairs, je trouve ça drôle de rire des contrariétés quotidiennes, de voir le verre à moitié vide, de s'attendre au pire; et  je suis vraiment comme ça. Mais évidemment, c'est une posture. Je ne suis pas seulement une petite fille gâtée qui pleurniche sur ses contrariétés (même si clairement, je suis aussi cette personne, mes parents peuvent en attester): mais les vrais drames, les grands échecs ou les disparitions passées ou imminentes je n'en parlerai jamais ici. Ce qui me rend vraiment malheureuse (pas plus ni moins que les autres), je le garde pour moi, par pudeur et par élégance. De la même manière que les grands bonheurs, mes fiertés maternelles et mes félicités diverses (tout est dans le "diverses" évidement), je ne les exposerai pas là non plus. Mais je trouve que ça rend la vie plus légère de rire des choses futiles et contrariantes, et j'adore être la looseuse de la blogosphère, j'aime ce costume qui me va comme un gant...

Enfin quand je dis "qui me va",  je devrais dire "qui va à Galéa". Parce que depuis deux ans, cet avatar étrange, créé à partir du mot "galet" (originalité quand tu nous tiens), prend de plus en plus de place dans ma vie, jusqu'à m'étouffer un peu. Galéa n'existe pas, soyons clairs, Galéa est une invention bloguesque.  Ce n'est pas qu'elle ment mais disons qu'elle ne raconte qu'une partie de la réalité, et elle me ressemble de moins en moins.

Galéa trie ses contacts sur Facebook alors que moi je me suis fait dégager par une vieille amie (suite à une altercation où je n'ai pas mis les formes). Galéa crie sur les toits qu'elle fume, mais moi, mes cheveux sentent le tabac froid. Galéa parle de ses filles, mais moi je leur dis de faire moins de bruit quand je suis sur mon ordinateur. En plus, Galéa est honteusement gâtée par ses amis blogueurs (en livres, en cartes Reine des neiges, en carnets et cahiers divers, en cartes, en coupures de journaux, mais surtout en messages d'amitié), et je vais vous le dire franchement, je ne suis pas certaine qu'elle le mérite, parce que la Galéa c'est une imposture!

Elle est plus jolie, plus sympa, plus droite, plus loyale, plus drôle que moi. En gros, Galéa me fait de l'ombre (un peu comme la copine de collège dont on est le faire-valoir, vous voyez?). 

Galéa parle de la loose en rigolant, mais pour moi,  la loose, ça veut dire quelque chose. Revendiquer la loose, c'est se dire qu'on est pas obligée de tout réussir, d'être devant sur la photo, ni d'être celui qu'on admire et qu'on jalouse. Se réclamer de la loose, c'est se reconnaître faillible, c'est ne pas chercher à faire plus ou mieux que les autres, c'est ne pas avoir besoin d'être le premier. Alors, bien sûr c'est une point-de-vue que les successful ne peuvent pas comprendre, mais je pense sincèrement qu'on peut vivre sans être compétiteur, chacun à sa manière et trouver sa place sans entrer dans une catégorie. La loose, c'est aussi revendiquer l'humilité, la retenue, la discrétion. Un looser accepte de ne pas être du côté de ceux qui brillent, et ça ne le dérange pas. Et moi je me suis toujours sentie plus à l'aise à l'ombre (mon mariage de ce point de vue est un éprouvant souvenir...Heureusement que c'était avec l'Homme).

Alors à ce stade de mes réflexions,  alors que des blogueurs que j'aime se mettent sur la réserve et qu'on est plutôt dans un monde qui prône le succès, quitte à perdre en élégance ce qu'on gagne en notoriété, je me suis dit qu'il était peut-être temps de se poser les vraies questions: on blogue pour qui? pour quoi? au détriment de qui?


Moi je blogue parce que peu de gens lisent dans mon entourage, et aussi parce que je suis égocentrique (mais non, les livres ne sont pas  qu'un prétexte), je blogue pour trouver une place, mais je blogue au détriment des gens réels, ceux auxquels je tiens et que je délaisse un peu. (Oui, je l'avoue, j'ai déjà menti à des amis chers pour annuler un rendez-vous car je n'avais pas fini un billet).


Et peut-être qu'il est temps de réfléchir à la place, parfois un peu inquiétante, que le blog prend dans sa vie, en termes de temps et d'énergie.

J'en étais là de mes réflexions, quand  le 9 octobre est arrivé.  Quand Modiano, mon Modiano, celui dont je relis plusieurs fois les livres,  a eu son Nobel.  Modiano, c'est celui qui a su mettre des mots sur des choses dont j'ignorais que je les ressentais. Il est des auteurs comme ça, grâce auxquels on comprend qu'on ne sera jamais écrivain, parce que les livres qu'on aurait voulu écrire existent déjà. Modiano a fait de moi une lectrice qui n'en demande pas plus.

Et le 9 octobre, en tout et pour tout, deux clients, ma mère et l'Homme étaient contents pour moi.

En revanche, Galéa a été inondée de mails, de textos, de messages qui partageaient son bonheur, Galéa a eu le sentiment de le recevoir elle-même le Nobel, Galéa a pleuré de joie de voir son romancier récompensé et s'est trouvée emportée dans un tourbillon tendre et bienveillant, créé par des blogueurs qui la connaissent finalement drôlement bien (elle était tellement heureuse que Numérobis a dit à sa maîtresse le lendemain, qu'on m'avait félicitée pour mon Nobel).

Il faut donc se rendre à l'évidence, j'ai encore besoin de Galéa, donc elle et moi allons continuer un peu notre petit bout de chemin ensemble...

(il faut juste qu'elle me remotive un peu).

dimanche 12 octobre 2014

Les joggueuses du dimanche

J'ai ouvert mon blog quand j'ai recommencé à courir.

Et je me suis aperçue que nous étions quelques unes à lire, bloguer et courir...finalement.

Et puis une idée farfelue en entraînant une autre, un jour je me suis dit que ce serait bien, en ces temps d'indéniables tensions virtuelles et réelles, de faire une petite vidéo potache des lectrices-blogueuses-coureuses...un tout petit moment consensuel en quelques sortes, avec un Miossec qui toujours me procure mon petit frisson armoricain...

Elles sont 8 à avoir répondu à l'appel, 7 blogueuses plus une commentatrice,  8 filles vraiment très différentes, qui ont renoncé à une part de leur dignité pour se filmer en courant, là où on n'est VRAIMENT pas en valeur du tout. Et si on se force à sourire, on a bien conscience qu'on n'est pas totalement avantagées par l'image qui bouge, la sueur qui dégouline, le cheveu qui frise, la peau qui rougit...Bref, on pourra pas nous accuser de donner une image trop flatteuse de nous-mêmes (et je n'ai gardé que les plans les plus avantageux).

Il y a des anciennes sportives de haut niveau, les fumeuses (enfin une en tous les cas), des escrimeuses (une en tous les cas), des filles au régime, des marathoniennes passées et en devenir. Elles n'ont pas la même vie, le même âge, le même nombre d'enfants, et à mon avis pas les mêmes opinions politiques ni religieuses. 

Il y a celle qui courent beaucoup, et celles qui courent en dilettante; les joggueuses qui sortent par goût de la solitude, d'autres qui ont besoin d'organiser ça avec d'autres; celles qui ont des objectifs à tenir, d'autres qui ne visent que 10KM par semaine, celles qui sortent même quand il neige et d'autres qui hésitent quand il pleut trois gouttes, celles qui ne courent jamais sans leur gourde, et d'autres qui ont besoin d'un casquette, celles qui revendiquent un esprit de compétition et d'autres qui y ont renoncé il y a longtemps ...

 Ce que je veux dire c'est que personne ne court de la même manière ni pour les mêmes raisons, mais sur les parcours, il y a de la place pour tout le monde et  pour toutes les foulées.

Ce qui compte c'est d'avoir gardé l'esprit du sport : mesurer ses forces, repousser ses limites, se forcer au fairplay, saluer la beauté d'une performance et avoir de l'humilité devant ses objectifs*.

J'en profite pour rappeler que cette année, Sophie organise son marathon solidaire. Sophie, c'est des jambes de gazelle, une volonté de fer et une plume splendide. Personne jusqu'à présent n'a mieux décrit les sorties du dimanche qu'elle. J'ai la chance de la compter parmi mes amies et de soutenir son projet (à mon petit niveau), je vous laisse aller découvrir son blog éphémère.

Merci donc à elle.

Merci aussi à mon autre Sophie, la lectrice de la maison rose (toujours partante pour un verre de rosé), 
- aux membres du gang 79's power : Miss Léo et Saxaoul
- à ma collègue-jurée Elle 2014 Enna, et à  Sandrine qui était presque jurée avec nous l'an dernier 
- à Malika qui nous a rejointes sur la dernière ligne droite,
-à Attila, qu'on ne présente plus, mais qui (quand elle ne se dispute pas avec les gens) apporte beaucoup aux blogs littéraires, sans jamais ouvrir le sien.
- et à Mrs B, qui même après avoir quitté la blogo a eu la gentillesse de prêter son image ici ;-)

Merci les filles de m'avoir permis de réaliser (le terme est un peu fort peut-être) ce film techniquement contestable,  esthétiquement médiocre mais, je l'espère,  bloquesquement fédérateur.

Les réponses à la question de Miossec "après quoi courent les joggers le dimanche" et dans ce chef d'oeuvre du 7ème art (dont je ne suis pas certaine d'assumer la paternité très longtemps).





Note: ne le mettez pas en grand écran, l'image bouge tellement que ça peut donner le mal de mer (moi j'étais limite tout l'après-midi).


*Ceux qui penseraient que je ne parle pas que de course ici auront sans doute raison.

jeudi 9 octobre 2014

Tag défi positif (WTF?!!!)


Mais que fait ce tag sur mon blog? Moi qui ne vois le verre que vide,  qui ai peur des maladies, des tremblements de terre, des pièces sans fenêtres, des attentats, des autres parents d'élèves, du vide, de certains produits ménagers, des dictateurs, des trajets en voiture, des médecins, des OGM et de la maîtresse de Rayures. Comment, avec une liste de névroses pareille, puis-je trouver, 3 jours de suite, 3 choses positives?

C'est de la faute de Sylire, une blogueuse qui a tenté de me faire faire un billet contre-nature, en exposant, sans retenue et sans pudeur, 3 choses positives samedi, dimanche et lundi dernier. Ce qui fait 9, ce qui en soi est mon bilan annuel.

Samedi
10h30: prendre 90 mn de mon temps précieux et rare pour boire un café, seule avec ma mère, au soleil, et me voir dans ses yeux, donc me trouver formidable (j'espère faire le même effet sur mes filles dans 30 ans...si un raz-de-marée n'a pas englouti la ville).

16h45: Retrouver, dans le placard des Playmobils, le sac de natation des enfants, 15 mn avant leur cours , et après plus d'une heure de dispute indigne avec l'Homme, pour savoir LEQUEL de nous deux avait rangé les sacs en juin, et surtout OU (il manque une gouvernante dans cette maison). Les filles ont donc pu reprendre la natation.


21h00: Finir ma journée avec Modiano (et l'Homme aussi, car je lui ai pardonné son manque total de clairvoyance quant au rangement des affaires de sport des enfants).


Dimanche
8h30: tenter une sortie en fractionné, se retrouver prise dans une course de vélos. Rentrer à la maison piteuse à 8h48 et entendre Numérobis dire "elle a couru hyper vite maman aujourd'hui" (je suis encore l'idole de ma cadette).

14h00: trouver que mes cheveux repoussent et que bientôt je pourrai remettre mes boucles d'oreilles à plumes.


19h00: tenter une incroyable expérience:  être optimiste. Donc laisser le linge dehors alors que le tonnerre gronde et que le ciel est noir. Résultat, j'ai du essorer les jeans à la machine. Coté positif: savoir que je suis dans le vrai quand je dis que le pire est toujours certain.


Lundi:
8h00: découvrir grâce à Facebook (et MTG surtout) que je ne suis pas la seule à avoir envie de me pendre le lundi matin.


17h00: recevoir enfin les tutus règlementaires de classique pour les filles (achetés et réglés il y a plus d'un mois). Bilan: Rayures sera boudiné dedans en juin pour le gala et je peux mettre deux Numérobis dans le sien. Moralité: j'avais raison (encore !), les tutus de danse taillent n'importe comment (une bonne occasion de révolte se présente à moi, j'envisage un billet qui dénonce!!!!).


20h30: prendre l'apéro avec l'Homme et me réjouir du retour-éclair de ma petite soeur sur le continent (enfin quelqu'un qui me dira sans ambages que mes cheveux sont trop courts, mes enfants mal élevés et mon fond de teint trop orange). Sa franchise et nos disputes me manquent terriblement (aucun second degré là-dedans, j'ai vraiment besoin de quelqu'un avec qui je peux me disputer sans conséquence).


Vu que j'ai été au maximum de ma positive attitude, et vu que tout le monde a été tagué, je vais m'arrêter là... mais si jamais Miss Léo, Malika ou Sophie du fil de l'eau veulent elles aussi nous faire croire que la vie est belle, ce serait charitable de leur part.


A tout bientôt les amis.

PS. Pour ceux qui veulent réussir leur vie (ce à quoi j'ai renoncé depuis un moment), je rappelle l'ouvrage de référence en la matière: La puissance de la pensée positive dont il faut savoir que c'était le cadeau de mon père à Noël dernier (alors que j'avais demandé un nouvel ordinateur). Mais ça aurait pu être pire, car ma soeur a reçu Oser être soi-même. Les nouveaux moyens d'affirmation du soi. Il se désole depuis que ses filles ne comprennent pas tous les degrés de l'humour (Tu m'étonnes).

lundi 6 octobre 2014

Une Education catholique

Catherine Cusset, Une éducation catholique
Gallimard, 2014, 132 p.
Chère Catherine,

Je suis cussetophile depuis plus de 10 ans, depuis que j'ai lu Le problème avec Jane en 2003 au moment de l'obtention de ma bourse d'allocataire-moniteur. Je ne vous cacherai donc pas que ce roman est une référence et un authentique coup de coeur. En plus, vous êtes l'un des seuls points de convergence littéraire entre ma petite soeur et moi. C'est ainsi qu'à Noël 2003 toujours, j'ai pu lui offrir Confessions d'une radine, sans que le repas de famille ne soit gâché par une énième dispute entre nous (elle m'a même dit merci, même après avoir lu le titre, c'est dire...notre père n'en revenait pas).


Chaque fois que vous sortez un livre, je me jette dessus, je m'enthousiasme des bons crus comme le Brillant avenir, et vous pardonne les opus moins réussis. J'aime que vous ayez un pied en France et un en Amérique, c'est ce grand écart qui donne une vraie originalité à vos romans et vous évite les écueils nombrilistes de la littérature française. Cette fois, c'est mon amie Marjorie qui me l'a offert, sachant que je l'attendais fébrilement.

Mais là, je vous écris, car ce n'est plus possible. Et c'est la lectrice qui vous aime qui vous le dit. Ne m'en veuillez pas de me le permettre.

Dans Une Education catholique, j'imaginais que vous parleriez de cette éducation justement,  de votre père chrétien, de l'odeur des églises, de la progression de la foi, de sa perte, des heurts, du questionnement religieux ....mais c'est un leurre, l'éducation en question ne concerne que 40 pages. Le reste du "roman" (90 pages)  touche à vos apprentissages sexuels. Mais là n'est pas le problème car à la limite, pourquoi pas.

Mon problème, c'est l'autofiction, cette gangrène littéraire française qui envahit notre paysage littéraire français.

Alors oui, vous allez me dire que vous faîtes ça depuis longtemps, et que si je connais votre oeuvre, je devrais le savoir. Oui, c'est vrai. J'ai lu La Haine de la famille, Confessions d'une radine, En toute innocence ou Journal d'un cycle (quoique ce dernier soit officiellement un récit). Mais peut-être était-ce à l'époque ou l'autofiction n'était pas encore à la mode. Mais peut-être aussi est-ce parce que vous êtes arrivée au bout de ce procédé. Peut-être que je connais trop les détails de votre vie. Et je vous le dis tout net, je vous aime en tant que romancière, mais votre vie ne m'intéresse pas Catherine (la panne sexuelle de votre futur époux lors de votre première nuit ou la taille de l'attribut de votre premier amour me laissent de marbre).

Ecrire un roman c'est comme cuisiner. On travaille une matière brute. Un restaurateur ne balance pas directement le produit l'assiette du client. Il y a un travail  en amont: le temps que la matière décante, qu'on lui donne sa saveur, qu'on expurge le trop (de sel, de gras, de sucre), qu'on cuise, qu'on dresse, qu'on transforme.  Le romancier travaille ses souvenirs comme le cuinisier son produit frais; et moi qui ne sait faire ni l'un ni 'autre, je suis une cliente particulièrement exigeante (typique des gens frustrés me direz-vous...pas faux).

Dans Une Education catholique, vous nous avez envoyé le produit tel quel, comme un condensé de 30 ans de journaux intimes . Pas de fil rouge.  Vous n'avez pas raconté d'histoire, vous n'avez pas réfléchi à une intrigue, vous avez balancé des souvenirs qu'on connaissait déjà de vos autres livres. Ca ne me dérange pas de lire tout le temps le même livre (je suis une modianette c'est dire), mais pas comme ça.

On sait qu'un romancier s'inspire de sa vie, de son entourage, de ses blessures et des autres pour fabriquer un roman. Mais il transforme, il ment, il enrobe, il biaise. Un romancier, il triche. Pourquoi vous ne trichez plus? Autant ça m'avait plu dans Confessions d'une radine, autant là je suis déçue. Parce que  moi voyez-vous, toute la journée je croise des gens qui me racontent leur vie, leur malheur, leur intimité, alors quand j'ouvre un livre, surtout l'un des vôtres, je cherche autre chose que ces confidences personnelles. Je cherche quelque chose de plus que le réel. De plus beau, plus grand, plus travaillé. 

Et puis (puisqu'on se dit tout hein) je ne supporte plus votre double, cette fameuse Marie qui est vous en pire. Vous en revenez toujours à elle quand il s'agit de vous dénigrer (pensez Catherine à toutes les Marie qui souffrent en vous lisant, parce que punaise, c'est dur que ce soit le prénom d'un personnage mou, pleurnichard, inconstant, pingre, mesquin, inconséquent et égoïste. Et vous savez bien que tous les parents n'ont pas la présence d'esprit de donner des prénoms originaux à leurs enfants, alors des Marie, il y en a beaucoup...je dis ça, je dis rien). Vous devriez moins vous regarder Catherine, parce qu'on en est tous là, si on s'observe trop attentivement, on se déteste. 

Si Marie est supportable dans Un brillant avenir, c'est parce que ce n'est pas elle le personnage principal, c'est Elena. Vous savez si bien parler des autres. Et dans Une Education catholique, vous aviez de quoi faire du roman. Ximena est un formidable personnage, en travaillant bien, vous auriez pu en faire autre chose qu'un souvenir de collège-lycée-prépa. Mince, il y a un quelque chose à creuser dans la relation dominé-dominant des amitiés adolescentes. Il y a matière à un roman avec cette Ximena. 

Les passages sur le décès de votre neveu (qui hante votre oeuvre) sont toujours aussi poignants (j'ai les larmes aux yeux à chaque fois) et démontrent vraiment l'affection réelle que vous avez pour votre soeur (même si c'est gênant ce que vous dites de son couple, même pour le lecteur). Pareillement, la femme entre deux hommes, l'esprit et la peau, j'aime. Mais là vos aller-retour entre Samuel et Al sont ennuyeux si on excepte les détails intimes. Je préférais de loin le trio amoureux d'Indigo qui m'avait bien plus émoustillée par la sensualité que vous y aviez mise autour de Géraldine.

Peut-être que 18 mois ne sont pas suffisants entre deux livres, en tous les cas pour que le second soit vraiment réussi (et puis bon 132 pages, franchement!!!)

Alors, en cette rentrée littéraire où les auteurs parlent essentiellement de leur vie ou de celle de personnages célèbres, en cette rentrée de non-fiction qui ne dit pas son nom, alors que la mode est à l'étalement de son enfance, de sa sexualité ou de ses affres matrimoniales, je suis déçue. Déçue que vous n'ayez pas fait la démarche du roman (et que ce soit quand même écrit sur la couverture).

Vous savez, et bien mieux que d'autres, mélanger réel et imagination,  vous inspirer d'individus pour faire des personnages, nous construire des ambiances indiennes, américaines ou bretonnes, nous livrer des romans dont vous maîtrisez les chutes et les retournements. Mais pas cette fois.

Ne m'en veuillez pas, Catherine, j'espère que vous comprendrez ma déception, même si je reconnais que certains y trouveront leur compte, ma petite soeur par exemple, ou Jérôme Garcin dans le Nouvel Obs (et mettre son enthousiasme sur le fait que vous publiiez chez le même éditeur est un pas que je ne franchirai pas).

Revenez-nous vite (moi je vous attends en tous cas)

Galéa

Une lectrice qui vous aime (et qui achètera votre prochain livre quoiqu'il en soit, parce que je reste fidèle, même quand les romanciers que j'aime se contentent du minimum syndical).

jeudi 2 octobre 2014

Les Bibliomaniacs et moi


En ce jour de rentrée littéraire, il était temps que je revienne sur la visite des célèbres Bibliomaniacs chez moi (enfin...pas loin de chez moi).

Pas facile de parler d'un week-end entre blogueuses, surtout pour moi qui n'en connaissais aucune en vrai, et qui ne suis pas très IRL dans l'âme...Cette rencontre, on ne va pas se mentir, je la redoutais, d'abord parce que je ne suis pas un modèle de sociabilité, ensuite parce que ce n'est pas facile d'accueillir des filles qui se connaissent déjà bien, qui se voient régulièrement, qui ont un projet en commun (j'ai donc harcelé des copines qui se reconnaîtront de mes doutes et autres angoisses étranges).

Et puis franchement quand on fait des heures de train pour voir quelqu'un, le risque d'être déçu est quand même proportionnel aux Kms parcourus non ?  (Bah si, évidemment)

Alors en quelques chiffres, mon week-end avec les Bibliomaniacs finalement ça a été:

- 2 jours sans ouvrir l'ordinateur (un truc fou qui ne m'arrive jamais le week-end).

- 1 traversée de la ville la nuit (23h), à pieds, en sandales (moyennement efficaces en cas d'agression) et vers la gare (sans doute mon  Koh Lanta personnel - avec point de situation toutes les 5mn sur Facebook pour dédramatiser l'événement, merci à Val, Sylire et Miss Léo, les blogueuses solidaires et  connectées, qui m'ont encouragée pendant mon périple à travers la ville)

- 4 heures de retard à l'arrivée pour les Parisiennes (ma loose est contagieuse, mais j'avais prévenu).

- 3 filles souriantes et détendues qui descendent du train, même pas cernées, même pas grincheuses, même pas énervées (une leçon pour chacun de nous, et surtout pour moi).

- 1 café le samedi matin à l'ombre des parasols d'une place aux façades ocres.

- 1 crise de spasmophilie à la gare à midi (accueil spécial pour mon binôme, Marjo, dans le bain dès son arrivée, à la manière de "bienvenue chez les névrosés").

- 1 apéritif avec fromage et charcuterie pendant que la nuit moite tombe sur la ville.

- 292ème débriefing du prix ELLE entre jurées.

- 1 pique-nique sur une colline et sous un ciel couvert (avec réflexions profondes sur le Babybel et le Caprice des Dieux).

- 2 petites filles qui distribuent leurs bracelets élastiques et font  un festival (sonore et visuel...).

- 10 mots prononcés par l'Homme en 3 heures, (un record pour ce taiseux qu'on ne fabrique plus que dans un petit village du Sud de la Bretagne).

- 1 petite émotion contenue au moment du départ (quand tu n'es pas démonstratif c'est pour toute la vie)

-...et puis des verres ringards de mariage, des marque-pages estampillés, un Irving dans mon sac, un triple carnet Chagall, du chocolat fondu, une discussion sur l'épilation définitive, des récits d'accouchement, des réflexions ferroviaires profondes...

Et moi mon week-end, c'était surtout Maxi Vav et son appareil photo (un petit gout d'Italie), l'enthousiasme de Coralie sur la coulée verte (un air de jeunesse dans une ville de vieux), Marjo et ses jeans (ici c'est encore l'été), Laure et la glace pralinée (une vague impression de vacances)...

Et enfin

-  59 mn d'enregistrement avec une Galéa en touriste (je n'avais lu que 2 des trois livres) et en mode mal-élevée (avec prise de parole intempestive, réflexions pas toujours très a propos, mauvaise foi et partialité, il faut se l'avouer, quand je parle je suis davantage dans l'esprit café du commerce que Masque et la Plume...élégance-attitude for ever) pour écouter c'est ici.

Ces quelques petits moment de vérité, certaines rigolades et autres confidences anodines, font que ce week-end nous place, les Bibliomaniacs et moi, de l'autre côté de la Toile, un peu hors de ce blog finalement, quoique...



Merci les filles