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dimanche 29 juin 2014

L'opération Sweet Tooth

Ian McEwan, Opération Sweet Tooth
Gallimard, 2014, 439 p.
Et voilà, je termine mon mois anglais de justesse avec le dernier McEwan, juste sur la limite (heureusement qu'il pleut aujourd'hui, j'ai pu rédiger un billet). Je suis très fière d'avoir réussi à honorer ce rendez-vous difficile à tenir en ce mois de juin surchargé (en pleine phase d'auto-congratulation).

Soyons honnête, je suis tombée en amour de McEwan l'année dernière avec Expiation , donc ce billet ne sera pas nécessairement des plus impartiaux (je suis une lectrice à la Cabrel "quand j'aime une fois c'est pour toujours").

En trois mots: c'est l'histoire de Serena, recrutée dans les années 70' par le MI5, pour s'ingérer dans la vie d'un romancier en devenir et vérifier qu'il rédige des oeuvres du bon côté idéologique de la guerre froide. 

Et comme dans Expiation, je suis une fois de plus sous le charme des personnages féminins de McEwan. Cette fois, il nous a campé une splendide Serena, belle et intelligente (bien plus que sa soeur Lucy visiblement assez moche, moins futée et limite un peu paumée). J'ai retrouvé avec plaisir la sensualité  et même la sexualité que McEwan sait manier avec brio (franchement la scène de la première fois avec Jérémy est très réussie). Et puis c'est toujours aussi drôle. Drôle comme j'aime, c'est à dire sans gros sabots, sans grosses blagues, drôle et un peu triste, drôle et un peu cruel...bref à l'anglaise. 



J'aime comme toujours tout ce qu'il sait mettre en périphérie du livre, l'ambiance d'un Londres pluvieux en économie permanente d'énergie (Serena qui déambule à Londres, vraiment je m'y suis crue). La colocation avec des avocates pas très fun formait une toile de fond idéale (être seule même à cinq c'est crédible). Le pasteur pas communicatif du tout, à l'ombre de sa cathédrale, c'est génial. La mère qui force sa fille à faire des mathématiques à l'université, c'est avant-gardiste. Les longues journées d'amour à Brighton ont un merveilleux goût d'iode. L'amie Shirley est parfaitement réussie (délicieuse prolétaire, renvoyée du MI5 qu'un destin plus joyeux attend ensuite), tout autant que le presque amoureux Max (dont je ne dirai rien pour ne pas déflorer).



Alors oui Attila, je sens que tu t'énerves là derrière ton écran, ce n'est pas le plus réussi des McEwan, je te le concède (d'autant plus facilement que ce n'est que mon deuxième). Je te jure de lire Sur la plage du Chesnil qui est bien mieux (je te fais confiance tu le sais bien). C'est vrai qu'il est moins rythmé, c'est vrai qu'il est un peu plus étalé, un peu délayé même parfois. Oui Attila, ce n'est pas le meilleur, c'est un diesel de chez diesel...


Mais quand même (écoute moi ne t'énerve pas), je vais t'avouer que j'ai pleuré à la fin (et tu sais bien qu'il m'en faut - vu que je n'ai pas de coeur). Le livre dans le livre, c'est toujours aussi magistral. Admets que tout s'emboîte merveilleusement bien, qu'il a bien travaillé McEwan, le puzzle est parfait. 

Reconnais aussi la belle réflexion qu'il fait sur la littérature. Rappelle-toi la scène où il parle de l'opération Mincemeat sur les plages espagnoles , là "où l'inventivité et l'imagination ont pris le pas sur l'intelligence" (p.434).

Et puis franchement, l'arroseur-arrosé ça reste une valeur sûre.


Je quitte ce mois anglais à regret, je me suis vraiment bien amusée, merci aux organisatrices, Lou, Titine et Chryssilda dont j'admire la patience, l'organisation et la constance.


Je finis juin sur les genoux et entre, complètement dépitée, dans juillet. A propos  de juillet, c'est ma première participation au challenge du leader sur la rentrée d'hiver (oui je sais, un 29 juin, c'est limite, mais Valérie est très indulgente avec moi).

Une chose est sûre, l'été arrivant : vous n'avez pas fini de m'entendre me plaindre...

(mais c'est aussi comme ça qu'on m'aime, isn't it?)

mardi 24 juin 2014

Orgueil et préjugés

Jane Austen, Orgueil et préjugés (1813)
10/18,  1982, 380 p.
Pendant longtemps, j'ai cru que je ne pouvais pas être une lectrice de Jane Austen.

Je ne suis pas friande des histoires d'amour (surtout quand elles finissent bien), des bals, ni des introspections romantiques; et j'associais Jane Austen à tout cela, avec du ruban, de la crinoline, des jeunes filles oisives et amidonnées issues de la bonne société anglaise, qui attendent patiemment le jour de leur mariage, en conjecturant sur celui des autres. 

Mais ça c'était avant ma passion subite pour Downton Abbey (et mon affection profonde  pour Lady Sibylle et Tom - je ne suis pas absolument remise de ce que vous savez). C'était avant aussi que ma libraire préférée m'offre Orgueil et préjugés pour mon anniversaire et que le mois anglais tombe fort à propos pour m'y lancer.

En fait, j'aime Jane Austen...mais pas complètement (Titine pardonne-moi). Mon problème avec Austen c'est que je connais déjà la fin de l'histoire.  Pour moi ce qui fait le sel d'Austen, ce n'est pas la résolution de l'intrigue, mais bien le cheminement narratif.  

Effectivement, l'histoire de la famille Benett s'écrit autour des  cinq filles (pas encore mariées), qui ne sont pas si riches que cela et qui n'appartiennent pas vraiment à la haute société. En plus, et ce n'est pas rien, les filles de Mr Benett n'hériteront pas du domaine de Longbourn à cause de l'entail qui permettra à un obscure cousin, Collins, d'être propriétaire  du domaine après la mort du mâle Benett.

Comme chacun sait l'arrivée de Mr. Bingley et de son ami Darcy, dans une propriété voisine, va bouleverser notre petite famille de province.

Les cinq soeurs sont vraiment réussies: Jane est parfaite de douceur et de bienveillance (même si bon, un peu de lucidité ne lui nuirait quand même pas), Lizzie a toutes les qualités de l'héroïne  puisqu'elle allie beauté, fougue, culture et jeunesse. Les deux dernières filles Benett sont horripilantes, superficielles et fatigantes. Et bien sûr j'ai une tendresse particulière pour cette pauvre Mary (la place du milieu: la pire d'une fratrie), ni jolie, ni talentueuse, qu'Austen laisse un peu de côté et pour laquelle j'éprouve beaucoup d'empathie.

J'ai vraiment (presque) tout aimé: cet humour corrosif contre les bonnes manières, la description des parvenus, le snobisme, le vrai, le personnage de la mère aussi ridicule qu'actuel, le faux mutisme du père. Si j'ai été surprise par la quantité de dialogues, ils étaient si bien écrits qu'ils ne m'ont pas gênée. J'ai aimé combien Austen se moque de certains usages, comment elle dépeint la mesquinerie humaine, les travers et la suffisance des uns et des autres, j'ai aimé son humour et parfois son second degré. Tout est drôle et finalement assez cruel.


Mon problème, c'est le dénouement. Il m'a manqué du tragique. Je ne déteste pas les happy-ends (quoique ....- rapport à mon tempérament joyeux), mais le côté moraliste m'a quand même gênée. Jane-la-douce épouse Bingley-le-tendre, Lizzie l'intègre convole avec le richissime Darcy, Lydia la superficielle se perd avec Wickham l'imposteur (Kitty saura-t-elle en prendre de la graine)? Quant à Mary, elle est destinée dès ses 18 ans à rester vieille fille (pour tout dire j'aurais aimé un destin dramatique pour elle, quelque chose qui me fasse pleurer sur son sort).


Bien sûr, tout cela est rattrapé par un Darcy terriblement séduisant (il faut dire que j'ai une passion pour les hommes qui ne sourient jamais, les beaux ténébreux, les faux orgueilleux, impopulaires par omission de paroles). 

Evidemment Bingley est réussi dans sa faiblesse, sa lâcheté et sa bienveillance versatile. Sans aucun doute, le personnage de Collins est formidable d'auto-suffisance (d'autant que des Collins existent encore, j'en croise un tous les jours). Le père Benett est formidable de résignation et de lucidité sur sa propre famille.

Mais ce sont les femmes avec lesquelles Austen est la plus sévère et la plus délicieuse. Entre Mrs Benett, l'ancienne beauté  perdue dans un flot d'hystérie permanent, les soeurs Bingley aussi creuses, riches que méchantes, ou bien Lady Catherine carrément effrayante de solitude , de certitude et et d'égoïsme, je me suis régalée.

Ainsi, j'aime le regard critique d'Austen sur ses contemporains mais je regrette sa bienveillance romantique envers ses personnages. Je me déclare donc officiellement demie-fan. 

La preuve:  j'ai osé dire sur le groupe anglais (au mépris de toute prudence) que je n'étais vraiment pas fan de l'adaptation de 1995, malgré sa très grande conformité au roman. A part Darcy que je m'imaginais exactement comme Colin Firth, tous les autres acteurs ont terriblement heurté l'image que je m'étais faite de chacun des personnages et de l'esthétique du roman...Et quand on a à ce point une idée précise d'un roman, j'ai envie de dire que c'est que une lecture réussie. 

Ce billet (que j'espère les fans pur-jus me pardonneront) est une participation au challenge de Miss Léo le mélange des genres, pour le classique étranger, et une lecture commune pour le mois anglais de Titine, Cryssilda et Lou avec mes copines Valérie et Marjorie...

Et comme me le conseille régulièrement ma petite soeur, je vais aller m'acheter un coeur...(histoire vibrer à l'unisson) 

vendredi 20 juin 2014

Harry Potter à l'école des sorciers

J-K Rowling, Harry Potter à l'école des sorciers
Folio Junior,  1998, 302 p.
Harry Potter est notre livre familial. Nous l'avons tous lu plusieurs fois, même Boucle d'Or l' écoute en CD, lu par Bernard Giraudeau.

Rayures a son interprétation d'Harry Potter, l'Homme aussi, mais vu qu'ici on est chez moi, c'est moi qui vais parler aujourd'hui du premier tome.

L'école des sorciers est loin d'être le meilleur des sept volumes, mais bon, autant commencer par le premier opus, quand Harry, neveu malheureux d'une famille normale (et qui compte bien le rester ad vitam) reçoit une lettre de l'école Poudlard pour l'informer qu'il a des pouvoirs magiques et qu'il peut intégrer cette prestigieuse maison d'enseignement connue du monde sorcier mais ignoré du monde mordu (normal).

"Mr et Mrs Dursley, qui habitaient au 4, Privet Drive, avaient toujours affirmé avec la plus grande fierté qu'ils étaient parfaitement normaux, merci pour eux". (incipit)


Autant dire tout de suite, que j'ai toujours pensé que J-K avait voulu avec Poudlard et les enfants sorciers nous parler en fait des enfants différents qui ne trouvent pas leur place dans le monde "normal". Je dirais même que pour moi, l'histoire d'Harry Potter, c'est celle d'un enfant surdoué (doué de pouvoirs exceptionnels) qui ne découvre son  identité profonde et réelle qu'à 11 ans, quand il se rend compte que finalement, il existe un autre univers qui n'est pas "normal" au sens ou l'entend sa tante, mais dans lequel il est quelqu'un d'important et qui compte. Il y a finalement cette question de l'image de soi : Harry est un souffre douleur dans le monde moldu mais c'est un héros chez les sorciers.



Harry Potter c'est la revanche des enfants différents et bousculés par les autres, c'est une ode à l'anormalité et une critique hyper sévère de notre monde (punaise, je connais plein de Dursley qui dégouteraient n'importe qui d'avoir des enfants). Et puis, il y a cette blessure, celle qui n'a pas tué donc qui a rendu Harry plus fort et qui est la marque de son exceptionnalité.


Mais J-K Rowling va encore plus loin. Elle parle à des enfants de 10 ans (puisque ça s'adresse à eux le 1er tome), du libre-arbitre. 

Les pouvoirs magique, c'est comme l'intelligence, cela relève de l'inné, on l'a ou on n e l'a pas. Mais si on l'a, qu'est ce qu'on en fait? La cérémonie du choixpeau est de ce point de vue merveilleuse. Dans quelle maison ira Harry, seul enfermé dans ce chapeau magique : Griffondor les valeureux, ou chez Serpentard les ambigus? J-K pose la question de ce que chacun veut être et veut faire de son pouvoir.

Et puis il y a cette galerie de personnages merveilleux de sorciers, : Hermione (fille de moldus) l'hyperscolaire travailleuse qui exaspère tout le monde, Ron le maladroit malchanceux (Rayures a une passion pour Ron qu'elle trouve drolissime), Rogue l'éternel adversaire loyal, Malefoy le veule, Neville qui aura besoin de 7 volumes pour découvrir sa valeur, Dumbledore le sage, Mc Gonagall la sévère bienveillante, et toute la série des menteurs toquards (les professeurs de la lutte contre les forces du mal) qui se font passer pour autre choses que ce qu'ils sont en réalité, sans oublier les méchants, nécessaires bras armés du Mal absolu: Voldemort.

Rowling est géniale parce que les 7 volumes ont leur germes dans le premier, elle avait tout imaginé d'avance. Elle n'est pas manichéenne Rowling, elle parle déjà du racisme à de très jeunes enfants, quand elle évoque ces sorciers au sang-pur qui ne peuvent être souillés par le contact des sangs mêlés (tome 6), elle parle de la pauvreté à sa manière avec la famille Weasley. Elle apprendra dans les tomes suivants ce que c'est que résister (avec l'Ordre du Phénix), de s'organiser dans l'ombre...punaise, elle est géniale.

Et tellement imaginative!

Elle intègre brillamment des trolls (dont celui qui scelle l'amitié entre Ron et Hermione), des stars du Quidditch, des bébés dragons interdits mais présents, avec une bibliothèque ahurissante, un château absolument magnifique et labyrinthique, avec un concierge inquiétant, une cape d'invisibilité et des autorisations de sorties, des hiboux voyageurs et des friandises surprises, un arbre qui cogne et des voitures qui volent, des photos qui bougent, un miroir du désir...bref tout un monde génial et cohérent à côté duquel on ne peut pas passer...


Harry Potter est le seul livre sur lequel je manque très clairement de tolérance, pourtant il m'aura fallu les hormones de grossesse pour pouvoir le lire (puisque je trouvais cela assez nul à la base), je trouve qu'il devrait être enseigné au collège, parce qu'il est bien traduit, qu'il est drôle, qu'il est complet, que tout est beau et juste et tellement fin...et terriblement actuel ...



Je suis George qui organise un challenge de relecture d'Harry Potter, à raison d'un tome par mois (il est possible que Rayures se charge du 2ème), et je contribue à la lecture commune avec Val, Marjorie, George, Fanny,  Fondant au chocolat, Virginie et Yoda bot et d'autres sans doute... et tout cela  pendant le mois anglais chez Titine, Cryssilda et Lou.

PS: j'avais oublié que la lecture commune était aujourd'hui, il est 6h38, je n'ai pas le temps de mettre tous les liens, je ne sais plus qui sont les participants de la lecture commune, je ne vais pas pouvoir corriger toutes mes fautes, ni de mettre en ordre ce billet foutraque. Mais, bon, je pense que l'idée générale est quand même claire....

mardi 17 juin 2014

Mon Festival du livre de Nice - 2014

Dans la vie, on se console comme on peut.

J'ai manqué le Salon du livre de Paris en mars, la remise du prix Elle en juin et un repas chez Ginger par deux fois cette année.

En revanche aller au Festival du livre de Nice était un objectif raisonnable et réalisable.

Nice : ses palmiers, sa Méditerranée, ses façades colorés, ses ruelles à l'italienne, ses chapiteaux dressés sur le cours Saleya à quelques mètres de la mer, son espace Livre Ancien, ses tentes du rayon jeunesse posées devant le Palais de justice....Elle était belle la ville avec tous ses bouquins qui cuisaient à l'ombre des toiles blanches.

Un salon que j'ai fait en pointillés, coincée entre  anniversaires, devoirs et livraison de plantes... un salon dont je n'ai finalement profité qu'en toute petite partie, mais sur lequel je ne peux m'empêcher d'avoir un avis (aussi définitif que partial).

Point de Kerangal, de Lemaître ou de Goby . Pas de Jaenada qui vient faire du clin d'oeil à la Niçoise, ni du Manook qui vient frimer avec tous ses prix, pas de Chalandon ni de sorjette locale, (probablement blonde peroxydée, avec un accent chantant et un top en léopard). Pas d'Edouard Louis non plus, pas d'enfants du pays qui ont pourtant une actualité littéraire comme Le Clézio ou Kepel.

En revanche, on avait de l'animateur télé, du présentateur de journal, du juge vindicatif, de l'actrice, de l'écrivain local qui a son heure de gloire, la fille "cachée" d'un président de la République défunt, et même le maire et ancien ministre invité dans son propre salon. Il y en avait des têtes connues, du produit télé, du bronzage artificiel et des dents phosphorescentes...

Si je continue dans cette veine là, je pourrais aussi vous parler du touriste (ou de l'autochtone d'ailleurs) en tongs et bermuda qui se demande qui est ce visage non télévisuel "bah c'est qui celui-là?". A côté d'eux, quelques auteurs peu connus attendaient derrière leur pile de livres. Parce que c'est une certitude, les téléspectateurs étaient plus nombreux que les lecteurs ... (et peut être que c'est pire dans la vraie vie). 

Mais tout ça, c'est si je me mets à être snob...(sachant que je n'ai pas besoin de trop forcer non plus).

Parce que le Festival du Livre de Nice ce n'était pas que cela...

Après avoir négocié âprement avec l'Homme pour qu'il me laisse partir plus tôt (un demi-siècle de féminisme pour en arriver là...Maman, pardon), j'ai réussi le vendredi à écouter les Tesson père et fils. Le père a  beaucoup parlé, et le fils a reçu le prix Baie des Anges pour S'abandonner à vivre.  Aussi brillants l'un que l'autre, il faut bien le reconnaître, c'était court mais cela avait du fond et de l'allure.


Je retiens aussi le beau Christophe Ono-dit-Biot. 

Christophe est trop raffiné pour moi (plouc un jour, plouc toujours), trop sentimental à mon gout (sans-coeur je suis, sans-coeur je reste), donc Marjo et Val, cette photo est pour vous. Cadeau. 

J'ai aimé sa démarche de proposer à Sylvain Tesson (en vain malheureusement) de rester pour dialoguer, preuve pour moi d'un anti-cabotinage. C'est donc seul qu'il a évoqué la mer, "la profondeur dans l'instantané" et sa passion de la photo.  Plonger démarre, d'après ce que j'ai compris,  avec le cadavre d'une femme (qui est celle du narrateur) retrouvée sur un rivage...tout de suite ça me parle. Oh tiens, en plus c'est un coup de coeur de Marjo.

Je retiens aussi un beau dimanche matin. Un libraire qui nous présente des trésors livresques qui ont un siècle, Jeanne Siaud-Facchin qui parle de méditation (mais que j'aime surtout dans le registre des enfants scolairement différents).

Un vraiment beau dimanche matin donc avec mes filles euphoriques d'avoir leur BD dédicacée après une demi-heure de queue. Il n'y a rien de plus chouette que ça pour dire vrai.

Et enfin, une discussion courte mais vraiment de qualité entre Jean-Paul DidierLaurent (auteur du Liseur grand chouchou de la blogo) et François-Guillaume Lorrain (auteur de L'année des volcans que Malika m'a convaincue d'acheter). Une belle discussion donc sur l'avenir du livre, le pilon, la mémoire, l'oubli, l'objet livre et le support dématérialisé. Je trouve vraiment qu'un dialogue entre auteurs est ce qu'il y a de plus exaltant dans un salon du livre, plus que n'importe quel romancier qui parle seul de son travail. 

Je termine avec  l'incontournable point loose (dans l'ordre chronologique)

Ne pas pouvoir entendre Dussolier faire une lecture le vendredi soir sur la colline du château (endroit magique s'il en est).
- Se tromper d'heure pour aller écouter Assouline et Grimbert le samedi et donc ne même pas les apercevoir. 
- Se prendre l'orage le samedi après-midi et une insolation le dimanche matin (et manquer les derniers entretiens, conférences et tables rondes de la journée).
- Ne pas oser aller à l'hôtel Aston écouter les tables rondes avec deux enfants en bas âge passablement énervées.
- Apprendre, après la clôture, qu'il y avait Baptiste Beaulieu du blog Alors voilà.

Alors, même si je me demande encore pourquoi organiser un salon du livre aussi tard dans l'année et aussi près de la rentrée littéraire, ce que je retiens finalement,  c'est un festival du Livre à ciel ouvert, avec une entrée gratuite, des gens qui déambulent entre des discussions presque sur le trottoir. J'ai apprécié cette philosophie du livre accessible à tous,  où badauds et touristes avec la serviette autour du coup s'invitaient auprès des auteurs en chemises. A défaut d'être élégant, ça avait quand même quelque chose de réconfortant. Parce que revenir du marché avec les légumes dans le sac et entendre Lorrain dire "la mémoire se nourrit aussi de l'oubli", je trouve ça finalement assez haut-de-gamme en fait (même en short et sandales).


J'espère de tout mon coeur que ce Festival, qui fêtera ses 20 ans l'année prochaine, gagnera en popularité auprès de nombreux auteurs, qu'ils ne snoberont pas le Sud de la France.

Déjà, que le crossbooking du Trône de fer soit absolument absent du quart Sud-Est, je trouve ça scandaleux (oui les éditions J'ai lu, c'est à vous que je m'adresse). 

Parce que, s'il le faut vraiment, je peux me mettre à citer Gary, Modiano, Matisse, Appolinaire, Leroux,  Pennac, Le Clézio et d'autres...qui sont tous passées par ici. 


Alors ce n'est pas parce que le littoral est saccagé par des promoteur véreux depuis les années 70' qu'il faut oublier que Nice est une ville de lumière et de couleurs, et que si elle a inspiré autant d'auteurs et de peintres, elle a forcément aussi son lot de lecteurs passionnés.


Merci donc du fond du coeur aux romanciers qui sont venus jusqu'à nous ....
(à ceux qui j'ai pu entendre, et à ceux que j'ai lamentablement manqués).

jeudi 12 juin 2014

Pourquoi être heureux quand on peut être normal?

Jeanette Winterson,
Pourquoi être heureux quand on peut être normal?
Editions de l'Olivier, 2012, 272 p. 
Hasard de mes lectures et des événements blogosphériques , je me retrouve à parler sur deux billets de suite des mêmes sujets.

Quand ma grande amie ZAP m'a offert Pourquoi être heureux quand on peut être normal ?, je m'attendais à l'histoire d'une enfant surdouée née dans la banlieue de Manchester, je me suis dit que ça allait me changer des ladies des manoirs.

C'est le moins que l'on puisse dire.

Mais être surdouée, n'est pas le propos de Jeanette Winterson (contrairement à ce que raconte la 4ème de couverture...passons, quoique je compte fonder un mouvement au sujet des 4èmes...).

Son récit est beaucoup plus dur, plus essentiel, beaucoup plus perturbant. Pourquoi être heureux quand on peut-être normal? c'est un peu  En finir avec Eddy Bellegueule, version fille britannique des années 70 et avec le recul en plus. Mais il y a de sérieux points communs. 

Eddy et Jeanette sont tous les deux extrêmement intelligents,  issus pareillement des milieux très défavorisés. Ils ont conscience très tôt de leur différence sexuelle, et se font globalement rejeter par les leurs. 

Chez Winterson, rien, absolument rien n'a été normal, ni sa naissance, ni sa famille, ni son instruction, ni son orientation sexuelle. Toute sa vie, elle a été et reste à la marge de la norme.

Parce qu'être abandonnée par sa mère à la naissance, ce n'est pas normal. Grandir dans un foyer adoptif sans argent ni amour, ce n'est pas normal. Tomber amoureuse d'une fille à 15 ans et se faire exorciser ensuite, ce n'est pas normal. Pas plus que de se faire mettre dehors à 16 et intégrer l'université derrière. C'est un parcours anormal... donc extraordinaire et passionnant.

Cette autobiographie a la violence de celle d'Edouard Louis. On y trouve des autodafés de livres, une gamine qui se fait copieusement cogner,  une secte religieuse qui attend l'Apocalypse et qui bannit livres et gravures de son quotidien. Et il y a un monstre absolu, la mère adoptive, la terrible Mrs Winterson.

Et puis, et surtout, et c'est ce qui diffère d'Eddy Bellegueule,  on y trouve le recul et quelque part une forme sinon de pardon, au moins d'acceptation. Il y a la quête de soi, de ce qu'on est, d'où on vient, la découverte d'une identité biologique et sexuelle. Winterson va très loin dans sa réflexion en s'interrogeant sur l'inné et l'acquis.  L'enfant adopté devient-il fondamentalement différent de ce qu'aurait été l'enfant biologique? Jeanette Winterson s'interroge presque sur le gène de l'homosexualité, sur le sien en tous les cas. 


Et puis, elle parle de ces blessures qui fondent notre individualité (elle évoque même la cicatrice d'Harry Potter), ce chapitre m'a éblouie, j'y pense encore souvent. Jeanette Winterson est d'une certaine manière devenue elle-même grâce à sa douleur, aux auteurs, à la littérature et l'écriture. Pourquoi être heureux ... est un livre qui parle des mots, de ceux qui sauvent une vie et qui lui donnent un sens. 


Mais ce n'est pas un livre joyeux,  au contraire, il se dégage de ce document une immense tristesse. En soi c'est un récit important et poignant, mais d'une telle noirceur et d'une telle désespérance, que je ne suis pas certaine de lire tout de suite ses romans.

C'est ma participation au challenge de Miss Léo, catégorie autobiographie et une participation au mois anglais chez Titine, Lou et Cryssilda

Et je remercie encore mon amie ZAP qui me l'a très gentiment offert il y a déjà un moment.

Il est maintenant possible que je me plonge dans du plus léger ...

dimanche 8 juin 2014

En finir avec Eddy Bellegueule-Édouard Louis

Le récit qui enterre Eddy Bellegueule

Je ne crois pas avoir déjà lu un livre aussi violent.

Inutile de rappeler l'histoire, à moins d'être sourd, aveugle ou retiré du monde (littéraire),  personne ne peut ignorer En finir avec Eddy Bellegueule. 

Couverture En finir avec Eddy Bellegueule

Le fascinant Édouard Louis

Je précise que je suis tombée en amour littéraire d'Edouard Louis, un soir de Grande Librairie, où il a failli me faire pleurer tant il transpirait d'intelligence, de justesse et de sensibilité. Quand il a cité Annie Ernaux, il était tellement bouleversant que je me suis dit que si son livre était à la hauteur de son discours, j'allais forcément être une lectrice comblée.

Et puis la polémique est née (avec des investigations aussi odieuses qu'indignes), et moi, courageusement, j'ai reculé. Il a fallu un concours aux Éditions du Seuil pour que je m'y frotte. Et quoiqu'en dise la première de couverture, Édouard Louis n'a absolument pas écrit un roman. Lui-même revendique son témoignage et assume le récit de son enfance pauvre et la découverte de son homosexualité.

La rage, la violence et la honte

Il est jeune Edouard Louis, il a la rage de la vingtaine, la cruauté de ceux qui ont beaucoup souffert et  la plume d'un Normalien. Alors forcément, c'est d'une violence ahurissante. Rien n'est épargné, ce livre suinte la haine de la famille pauvre dont il est issu et le rejet du prolétariat dont il a honte. Les pauvres (ceux dont il nous parle) sont alcooliques, violents, racistes, homophobes, bêtes, sales et incultes.

Je suis encore estomaquée qu'on puisse dépeindre les siens jusque dans les détails les plus humiliants. Rien n'est épargné : les rires de sa mère qui raconte sa fausse couche dans les toilettes, le niveau de langage  (mis en italique, comme tenu à distance de son propos), les tares familiales (cousins malformés, taulards et consanguins), l'omniprésence de la télévision (rendue obligatoire), le coït parental (écouté derrière la porte), la violence du frère (qui manque de le tuer), le harcèlement des collégiens (avec les détails pervers de la torture quotidienne que ses bourreaux lui infligent)...

Que le lecteur qui n'a pas été chamboulé de ces passages me jette la première pierre...

La confusion du combat

Mais, quelque part, tout cela, quoiqu'à la limite du supportable, est légitime, parce que la vie d'Eddy Bellegueule était insupportable. Et puis reconnaissons qu'on sait qu'ils existent ces gens-là et Edouard n'épargne pas plus Eddy que les autres dans l'image qu'il renvoie de lui.

Mon problème est ailleurs.

J'ai eu le sentiment qu'Edouard Louis associait son rejet en tant qu'homosexuel au milieu pauvre qui était le sien. La corrélation me paraît malheureuse. Comme si les familles bourgeoises (ou même moyennes) acceptaient mieux que les grands déshérités d'avoir des fils efféminés. Et là, pardon, (et pour le coup je sais de quoi je parle)... Non.

Les pauvres ne sont pas plus homophobes (ni plus racistes d'ailleurs) que les autres classes sociales. Les bourgeois aussi entretiennent l'image de base qu'un homme, un vrai, fait vivre sa famille, a une voix grave, est sportif (football, ski ou voile quelle importance?). Les bourgeoises aussi guettent les ventres des femmes qui s'arrondissent et suspectent une épouse sans enfant. Il y a juste le vocabulaire qui change. Ce n'est pas une question de classe sociale d'accepter son fils tel qu'il est, c'est une question d'intelligence et de tendresse.

La scène du hangar aurait pu se passer Place Bellecour à Lyon, dans l'Ouest parisien ou dans un hôtel particulier bordelais. Des cousins de 15 ans, pervers et dominateur, qui ressemblent à celui d'Eddy (qui n'a que 9 ans!),  je crois qu'il en existe dans les centre-villes et dans des appartements standing. Les tentatives douloureuses d'Eddy avec Sabrina ou Laura, l'auraient été pareillement dans un autre milieu, seulement elles se seraient appelées Clara, Léa, Constance ou Sixtine selon la classe sociale.

Le bruit sourd de la souffrance

Aujourd'hui encore, des garçons efféminés sont font harceler au sein de collèges classés en zone violence comme dans de prestigieux établissements privés, c'est juste le niveau de langage et la marque des vêtements qui changent. La victime aurait vu des chaussures bateaux quand sa tête aurait cogné contre le sol plutôt qu'une paire de baskets.  Mais la méchanceté gratuite et le plaisir qu'elle procure aux bourreaux restent identiques.

Je crois vraiment que son parcours d'enfant (qui se sait sexuellement différent) est très proche de celui d'autres garçons issus d'autres milieux. Il y a une universalité dans le récit de son apprentissage de lui-même et de son adolescence. C'est juste qu'Eddy a vécu tout cela en plus de la honte d'être pauvre, d'être privé de confort matériel, de référents culturels et d'une possibilité d'imaginer sa vie autrement (on est d'accord c'est énorme).

Les zones d'ombre et les nuances de gris

La grande absente du livre, c'est l'école de la République. Pour finir à Normale Sup, être un élève moyen de Picardie ne suffit pas. Le système scolaire a forcément joué son rôle avec lui, il a nécessairement eu les moyens d'exploiter ses possibilités intellectuelles, de travailler, de récupérer les bases qu'il assure ne pas avoir.  Cette ellipse est curieuse.

Par contre,  je trouve malgré tout, que sans cacher la répulsion que ses parents lui inspirent, il écrit quelque chose qui, sans ressembler à un hommage, tend vers une certaine reconnaissance. Il y a de beaux passages sur la condition ouvrière (p.41), et Édouard Louis évoque malgré tout les tentatives maladroites et sporadiques de ses parents de le défendre (contre son propre frère p.58) et de le soutenir (quand il part passer son audition), avec des moyens ridiculement peu adaptés mais une volonté réelle.

Dans En finir avec Eddy Bellegueule, Édouard Louis s'assume homosexuel tout en se débarrassant d'origines populaires dont il a terriblement honte. C'est peut-être qu'il fasse les deux ensemble qui me heurte. Car ce livre est un assassinat social et civil, dans lequel il enterre son ancienne vie et fait disparaître de sa carte d'identité un nom de famille transmis par des gens qui, sans doute, n'ont pas su protéger, comprendre ni rassurer le petit garçon qu'il fut. Et qui lui font encore honte sans doute.

Le malaise de la disparition d'Eddy Bellegueule

En finir avec Eddy Bellegueule est à mes yeux un livre important, qui marque la naissance d'un écrivain et la disparition d'un jeune homme qui n'est plus. Ce n'est pas une image, Édouard Louis a vraiment modifié son état civil, il a vraiment fait disparaître Eddy Bellegueule. Ce livre était sans doute nécessaire pour continuer à avancer.

Comme dirait ma mère, "ce qui est dehors n'est plus dedans", Édouard Louis en a donc fini avec Eddy Bellegueule maintenant. Je crois qu'un jour, s'il continue en littérature, il reviendra sur cette mue extraordinaire et fracassante.

Quant à moi, j'aurais aimé être plus concise mais je ne suis pas certaine d'avoir un avis définitif sur ce livre, je m'interroge encore sur ce que j'en pense vraiment.

Merci aux Éditions du Seuil.

jeudi 5 juin 2014

Ma remise du prix des lectrices Elle (en direct live)

Ce soir, je suis invitée à la remise du prix des lectrices de Elle.

Alors, j'aurais pu vous raconter que ce matin, je suis allée jusqu'à Marseille rejoindre mon amie Dominique pour prendre le train toutes les deux vers Paris. Vous auriez rigolé en sachant qu'à Lyon je serais descendue sur le quai pour fumer une cigarette, et que Dominique m'aurait hurlé de remonter vite dans le wagon sous peine de passer ma soirée dans la capitale des Gaules.

Je vous aurais ensuite rapporté ma surprise à la vue du beau temps parisien (avec une petite digression sur les terribles a priori des sudistes qui remontent au Nord de la Loire). J'aurais sans doute fait une crise de panique dans le métro, en admettant avoir pris le bon. Mais Dominique m'aurait rassurée et remise dans la bonne direction bien sûr.

Et nous serions (peut-être) arrivées à l'heure chez Ladurée où une poignée de jurées se séraient réunies  pour faire connaissance avant les tables rondes. Là je me serais ruinée en prenant une salade à un prix ahurissant tout en jaugeant, version IRL, toutes ces filles avec lesquelles je discute (ou me dispute) depuis presque un an. J'aurais découvert des couleurs de cheveux, des tailles, des grains de voix que je n'imaginais pas. Et puis, je me serais sûrement fait le complexe de la provinciale, qui n'a pas compris que pour un cocktail on met une tenue un peu habillée, et je me serais dit (en voyant les chaussures à talons et les robes distinguées) que j'aurais quand même pu faire un effort (surtout que ma mère me l'aurait dit avant de partir).

Et vu que j'aurais répondu à l'invitation de Elle, j'aurais su, une semaine avant, quels auraient été les lauréats.  J'aurais donc préparé  mon petit laïus pour M. Manook en lui disant quand même qu'il n'avait pas été très discret, puisque dans son commentaire du 19 mai sur mon blog, on se doutait quand même que Yeruldelgger serait le lauréat dans la catégorie polar.

J'aurais probablement amené avec moi mes exemplaires de Vendredi Soir et Stallone pour que Emmanuèle Bernheim me les dédicace, puisque j'aurais été au courant que Tout s'est bien passé avait remporté la catégorie Document.

Mais surtout, j'aurais su que ce que je craignais était arrivé, que le K avait raflé le prix du roman.

Moi qui ai aimé presque tous les gagnants des romans du prix Elle ces 10 dernières années, c'est un livre que je déteste qui l'emporte l'année où je suis jurée. Ce n'est plus de la loose, c'est de l'Art. 

Je me serais excitée toute seule, mauvaise perdante que je suis. Enna, Natalie, Coralie, Pascale et Eva m'auraient un peu disputée, en me disant que vraiment que je n'étais pas fairplay, qu'il fallait se ranger à l'avis de la majorité. Certaines m'auraient même peut-être carrément ignorée, voire trouvée terriblement lourde. C'est là que je leur aurais expliqué que même à la belote j'ai du mal à perdre et que je me suis fâchée avec mon cousin-presque-frère le jour où, en tant que partenaire, il a pris à pique sans le valet (ni le 9 d'ailleurs). Il a fallu du temps ensuite pour qu'il accepte d'être mon témoin de mariage et le parrain de ma fille.

Sans doute aurais-je crié au complot, à la falsification des résultats, j'aurais essayé de rallier à ma cause, Martine, Mathilde, Dominique et Marjorie pour ne pas être trop seule.

Et puis nous serions toutes parties aux tables rondes, moi empestant le tabac froid et avec ma mine des mauvais jours. A partir de 18h, j'aurais appelé chez moi toutes les 30 mn pour vérifier ce qu'auraient mangé les filles, l'avancée des devoirs et l'heure du coucher....jusqu'à ce que j'abuse du champagne.

Ensuite, il y aurait eu la photo des jurées sur les marches, que j'aurais montrée à ma soeur aînée ce week-end, histoire de frimer un peu devant mes nièces. Je me serais mise à côté de mes copines préférées, en sortant toutes mes dents et en priant pour que mon nouveau fond de teint (une escroquerie sans nom) tienne jusqu'au soir.

J'aurais peut-être, dans l'euphorie de l'alcool, tenté de transmettre à Olivia de L. les félicitations d'Attila sur son récent prix de meilleure journaliste littéraire. Et si j'avais eu l'alcool mauvais, j'aurais peut être agressé l'éditrice de Kasischke, en évoquant une théorie du complot. (Personne n'a prévenu Laura que je ne venais pas, du coup elle est restée aux US).

Je sais en fait que nous serions restées entre jurées, je ne crois pas que je me serais mêlée au gratin littéraire parisien (déjà rien que ma tenue aurait été un obstacle). Vaguement mal à l'aise, j'aurais rigolé avec mes copines, tenté de reconnaître quelques vedettes de la littérature, et je suis presque certaine que les affinités virtuelles auraient été fidèles à l'IRL.

Et puis repue de champagne et de petits fours, je serais rentrée chez une blogueuse qui aurait eu un bout de canapé à m'offrir (ou chez ma tante en banlieue qui veut m'engraisser dès qu'elle me voit, ou chez mes cousins et amis déjà serrés avec leurs enfants dans leurs appartements intra-muros, mais qui m'auraient fait une petite place "pour une fois que tu montes").

Et au retour je vous aurais régalé d'un délicieux billet d'envoyée spéciale, plein de mauvaise foi, ou Kasischke en aurait pris pour son compte, et dans lequel j'aurais brossé le portrait de certaines jurées (enfin celles qui m'auraient supportée jusqu'au bout).

Mais en fait, je ne me suis disputée avec personne car, dans la vie, on est moins libre qu'on le croit de se fritter avec autrui.

En réalité, aujourd'hui, je suis restée chez moi, j'ai reçu, dès l'aube, des textos de Dominique qui était sans moi dans la rame du train. J'ai travaillé toute la journée en faisant la tête, mais non sans échanger  avec Valérie-  privée de cérémonie pour cause d'oraux du bac- des petits mots de soutien. Nous serons vraiment restées jusqu'au bout la fayote et le leader. Finalement, l'école m'a appelée pour récupérer Rayures qui fait une grosse crise d'asthme (vivent les pollens). Donc je pense que le cosmos m'a envoyé un message clair: ma place était chez moi (n'est pas Clémence?)

Sauf que je reçois, tous les 1/4 d'heure, un petit texto de jurée, avec une photo, un petit mot gentil, une blague, et en plus Marjo et Dominique (qui réconcilieraient n'importe qui avec le genre humain) me font vivre la cérémonie en live (avec photos et commentaires). Ma coupe est donc vide....

...mais j'y suis un petit peu quand même...

Bien sûr, je vais attendre demain pour savoir qui sont les heureux lauréats, j'espère ne pas avoir une mauvaise surprise...

dimanche 1 juin 2014

Le miroir brisé

Jonathan Coe, Le Miroir brisé
ill. Chiara Coccorese
Gallimard Jeunesse, 2014, 112 p.
A partir de 11 ans.

Après deux trimestres sans être convoqués par la directrice de l'école, l'Homme et moi même avons décidé de féliciter Rayures de ce nouveau départ. Elle voulait le Terrier des Légo Harry Potter (oui alors c'est pas Noël non plus hein), donc je lui ai offert le Miroir Brisé de Jonathan Coe, vu chez Noukette et Jérôme


Personnellement, je ne lis jamais de livres jeunesse parce que :
1: je suis une mauvaise mère
2: j'ai à peine le temps de lire mes livres à moi
3: je crois que les livres (mêmes ceux des enfants) forment un jardin secret dans lequel la mère n'est pas nécessairement obligée de pénétrer (maman si tu me lis, ce n'est pas un message personnel...)

Donc depuis que Rayures sait lire, je lis l'histoire du soir à Boucle d'Or et je laisse ma grande bouquiner dans son lit.


Le problème chez nous, c'est que je suis fondamentalement désorganisée ET je tiens un blog. Et vu la place grandissante que prend le blog dans ma vie, c'est forcément au détriment des enfants. C'est ainsi que Rayures, excédée du temps que je passe avec mon ordinateur, s'est fortement fait entendre, en disant qu'elle aussi lisait, qu'elle aussi avait un avis ....


Si l'on rajoute à cela que  j'ai un fond influençable et envieux, je copie donc sans vergogne (mais en leur rendant hommage) George et Valérie qui, bien avant moi, ont fait parler leurs enfants sur leur blog respectif. 

J'inaugure donc aujourd'hui, pour le premier jour du mois anglais, un nouveau rendez-vous: Les mots de Rayures que j'essaierai de publier le 1er de chaque mois. Je tente dans la foulée (j'ai besoin d'émotions fortes en ce moment) un nouveau format. Le principe est donc  d'enregistrer les mots de Rayures et de les poser sur une vidéo de sa soeur floutée (parce que je ne voudrais pas, dans 10 ans, entendre que j'en ai mis une en valeur au détriment de l'autre- être une mère équitable ça commence très tôt). 

L'ensemble est (soyons honnête) un peu moyen. Elle a eu du mal à se détendre (je crains son bac de français pour tout dire...humour!!!), ses souvenirs étaient assez approximatifs, parce qu'elle l'a lu il y a plus d'un mois (mais bon je voulais coller au mois anglais), c'est décousu, subjectif, pas très pro...bref c'est un galop d'essai...et elle en est très fière, donc j'ai envie de dire, c'est un peu le principal...

Good bye friends